
Le Maître de l’Océan : petit imprécis de taoïsme par Diane Ducret
L’autrice à succès, Diane Ducret (Femmes de Dictateurs, La meilleure façon de marcher est celle du flamant rose, Dictatrices) revient avec un conte philosophique, mâtiné de roman de voyage et saupoudré d’autobiographie. Un tout-en-un, sans aucun doute très efficace pour ratisser large, mais qui comme tous ses semblables des rayons cosmétiques et détergents ne remplit aucune fonction correctement.
De la campagne chinoise aux côtes normandes…
Un jeune garçon, au parcours familial terrible : né d’une fille mère handicapée par les mauvais traitements d’une éducation drastique dans une Chine rurale profonde, devient orphelin très tôt dans une insoutenable pauvreté. Rejeté par son grand-père, il est placé par dépit par celui-ci dans un temple taoïste. Arrivé dans ce temple, le jeune garçon comprend quel est son but : rejoindre le sanctuaire d’Or en haut de la Montagne pour retrouver symboliquement sa mère. Cette quête, bien évidemment spirituelle, est contrariée par la fougue et l’impatience de la jeunesse : le garçon veut voir l’océan.
Un voyage commence, emmenant notre apprenti taoïste dans diverses formes d’embarcations du fin fond de la Chine au Mont Saint-Michel avec comme seul guide une série d’enveloppes – dont l’idée semble toute droite sortie de Pékin Express. Cette « route de la soie » revisitée au goût de kiwis (l’enfant voyage dans un cargo chargé de kiwis, fruit que sa mère lui apportait, permettant ainsi de faire une référence d’une infinie légèreté à Proust et sa madeleine) offre la possibilité de faire des descriptions de tout type de paysages. L’autrice enchaine ainsi les décors avec un style pompier frôlant parfois la mièvrerie (la découverte du fleuve Bleu qui n’a pas réellement la couleur de son nom…) et des expressions que l’on pourrait prendre, en premier lieu pour des licences poétiques, mais qui, à force de répétitions, font pencher pour une liberté presque dyslexique d’expressions usuelles.
Arrivés au Mont Saint-Michel, nous assistons à une initiation intellectuelle par le truchement de la mer, de ses vagues… Une évolution de plusieurs années qui, fort heureusement, est brossée de manière très rapide pour finalement assurer un retour au bercail. Celui-ci se fait dans des conditions beaucoup plus sereines, les moines ayant décidé de faire une collecte pour offrir son billet au disciple spirituel. De retour en Chine, l’élève a dépassé le maître et devient, tout naturellement, le Maître de l’Océan, car celui-ci lui a parlé et qu’il a su l’écouter.
Un voyage cachant de rares belles escales
Le Maître de l’Océan part d’un postulat intéressant, et pourrait embarquer beaucoup de lecteurs si un choix avait été fait, mais beaucoup trop d’auteurs sont convoqués. Voyage, initiation, quête de soi, … le roman coche toutes les cases pour séduire un maximum de lecteurs et pourtant n’y parvient pas. Le livre annonce la couleur avec la citation de sa couverture : « Une seule goutte d’amour peut guérir un océan de solitude ». Le Maître de l’Océan est rapide à lire et peu exigeant intellectuellement. Finalement peut-être trop peu pour respecter pleinement et les lecteurs et le thème existentiel de la quête. Si, au détour de certaines phrases, l’on retrouve l’amour de l’océan et le talent de l’écrivaine belge ayant grandi au Pays basque pour faire passer des émotions et des ressentis de la plus belle des manières, ce nouvel opus frôle la paresse intellectuelle et prend en tout cas de manière certaine une voie trop facile pour « démocratiser » la réflexion spirituelle.
Le Maître de l’Océan, Diane Ducret, Éditions Flammarion, 240 pages, 18€
Visuel (c) Couverture du livre