
James Ellroy, La malédiction Hilliker « obsession en 6 mouvements »…
Moins d’un an après sa sortie officielle, Rivages / Noir réédite en format poche le dernier ouvrage de James Ellroy, « La malédiction Hilliker ». Retour sur une confession obsessionnelle…
James Ellroy, de son vrai nom Lee Earle Ellroy, (né le 4 mars 1948 à Los Angeles en Californie) est un écrivain de polars américain.
S’affirmant comme « conservateur » et « réactionnaire », il dépeint dans son œuvre un monde particulièrement pessimiste et corrompu, dans lequel perce néanmoins la notion de rédemption, fil conducteur de nombre de ses ouvrages. Parmi ceux-ci, on peut citer la série de quatre livres sur Los Angeles dont font partie « Le Dahlia noir » et « L.A. Confidential », sa trilogie « Underworld USA » qui retrace son histoire des États-Unis de 1958 à 1973, ainsi que son récit autobiographique « Ma part d’ombre ».
En six mouvements, Ellroy revisite les moments clés de ses relations avec les femmes, à commencer par la première d’entre toutes : sa mère, Geneva « Jean » Hilliker, victime d’un assassinat trois mois après que, enfant, il ait souhaité sa mort, jusqu’à la femme qui partage sa vie aujourd’hui, en passant par ses amantes, les femmes sur lesquelles il a fantasmé, celles qui l’ont inspiré…
La mort de sa mère est l’objet de la « malédiction ». Après avoir vainement tenté de retrouver la trace de son meurtrier dans « Ma part d’ombre », il entreprend ici une autre forme d’exorcisme : annuler la malédiction à travers la quête des autres femmes, passer de « Elle » à « Elles ».
Les autres, ce sont les adolescentes sur lesquelles il fantasmait dans sa jeunesse, mais aussi des femmes mûres, réelles ou imaginées.
Les autres, ce sont aussi celles qui ont exercé une influence majeure sur lui, la journaliste Helen Knode, alias « Cougar », puis « La Déesse » Joan, inspiratrice du personnage éponyme d’ « Underworld USA », et enfin, l’autre « Elle », la femme qui partage sa vie aujourd’ hui.
« Ce livre m’a dévasté », dit James Ellroy à propos de La Malédiction Hilliker qu’il définit comme « un manifeste romantique ».
En effet, ce livre est la confession d’une vie vécue comme une névrose dépressive, parsemée de pulsions hypocondriaques, d’insomnies et de voyeurisme, où le sexe est un enfer.
Mené tel un road movie incestueux et démoniaque, plongé dans le noir sur fond de Beethoven, Ellroy nous ouvre son cœur et son âme meurtrie.
Les abus de drogues et d’alcool (premier coma éthylique à l’âge de neuf ans) ne font que poursuivre son travail d’auto-destruction.
Il ne doit sa survie qu’à la certitude de son talent d’écrivain mégalomane qui n’espère rien, risque tout, donne tout.
Un livre que les fans d’Ellroy vont adorer, permettant ainsi d’appréhender son œuvre avec un regard nouveau, et qui risque de donner envie aux autres de se plonger dans le « Dahlia Noir ».
La malédiction Hilliker
James Ellroy
Rivages – Rivages Noir – N° 885
Octobre 2012
Traduit par Gratias, Jean-paul de Anglais (Etats-Unis)
310 pages
8,65 euros