Le Sorelle Macaluso
Il n’est pas si courant de voir une cinquantaine de lycéens occuper les rangs d’une salle de spectacle au Festival d’Avignon et rester cois le temps de la représentation. Puis, dans un bel ensemble, se lever l’oeil humide pour ovationner ce qui venait de se passer sur le plateau. Quelques minutes plus tard dans la moiteur retrouvée de la ville, le silence enrobe les jeunes. La parole est superflue. Plus tard, il sera temps de se parler. Les adultes qui accompagnent n’en disent pas plus. C’est à ce type d’expérience, à cet aller-retour en émotion que nous convie Emma Dante en nous faisant voir et entendre l’histoire de sept soeurs palermitaines. Sept soeurs qui dans un espace entre la mort et la vie font ressurgir le passé tu ou révélé. Comme dans tous les secrets de famille, ce passé silencieux cimente la cohésion du groupe. Qu’il vienne à se fendre et c’est le corps social qui se fend à son tour. Sur fond de souvenirs d’enfance et sous les regards revenus du père et de la mère, les soeurs vident leur sac pour en extirper les souffrances et les rancoeurs. Les comédiens, sur le plateau vide, investissent l’espace de la représentation tandis que les personnages investissent celui de nos coeurs sensibles. Le jeu des corps à la face des spectateurs alterne entre la farce et le tragique, et ces corps grotesques s’écroulent quand le passé ressurgit. Antonella, Cetty, Gina, Katia, Lia, Maria, Pinuccia attifées de robes aux couleurs vives ou revêtues du deuil nous transportent des larmes au rire, nous rappelant que si nous ne sommes pas morts, sommes-nous vraiment vivants ?
