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Swing Rendez-vous

Swing Rendez-vous

09 January 2023 | PAR Nicole Gabriel

En ces temps de morosité tous azimuts, il ne faut surtout pas manquer le premier long métrage de Gérome Barry, léger et pétillant comme une bulle. Certes, la référence principale du jeune réalisateur est Tout le monde dit I love you (1997) de Woody Allen, dont certaines scènes sont d’ailleurs reprises, comme les courses-poursuites et l’envolée de Goldie Hawn à Paris, sur les quais de Seine. Mais le film fourmille aussi de trouvailles et de gags visuels et sonores originaux.

Paris

Ainsi, dans une production hexagonale, la voix off est livrée en américain ; l’utilisation du dessin animé vient par moments enrichir les prises de vue réelles ; l’évocation de Paris et de New York ne doit rien aux symphonies urbaines mais tient plutôt de petites musiques de nuit. De la sorte nous est brossé le portrait mi amusé, mi désenchanté d’une génération de trentenaires – celle du cinéaste, en l’occurrence. Théodore (Gérome Barry himself) promène partout son spleen. Sa petite amie l’a quitté ; il déteste son boulot ; il ronge son frein le dimanche midi chez sa mère, une grande bourgeoise qui essaie de lui remonter le moral mais ne fait que l’exaspérer. Le lundi matin, quand il met la radio, c’est pour entendre une intervention du premier ministre annonçant une imminente baisse des salaires. Arrivé à son arrêt de bus, il constate que le sien ne passera que dans 46 minutes.

Cerise sur le gâteau, ses meilleurs copains, un garçon et une fille, le lâchent pour se marier. Il doit se faire à l’idée de rester seul. Le dernier, croit-il, des millénials, pour reprendre ce terme qui, pour les sociologues, désigne les enfants des baby-boomers. Autrement dit des adultes atteints du syndrome de Peter Pan. Place des Vosges, comme frappé par la foudre, il trouve à point nommé une raison de vivre : une joggeuse entr’aperçue. La mignonne court en laissant se balancer sa queue de cheval. À partir de là, le scénario se délite un peu. Notre héros la suit, la poursuit, campe même devant chez elle sans oser l’aborder. Il faut dire qu’il n’a rien du mâle alpha : il est petit de taille, qui plus est myope, rouqemoute, perpétuellement dans les choux. Un Woody Allen, mais sans faconde. Pour atteindre sa cible, il recourt à la magie. Ayant entendu dire que la chanson de jazz “The Sound of Love” pouvait rendre l’autre amoureux, il se met en quatre et en quête pour dénicher la partition qui se trouve… à New York.

New York

Changement de décor, changement de tempo. Il faut dire que la séquence américaine est épatante. Le Frenchie est accueilli à bras ouverts par le milieu du jazz ; il hante les bars et les clubs où l’on joue du swing et où l’on danse le lindy-hop comme dans les années 30. Cette partie, façon reportage, est pour nous la plus réussie du film. Gérome Barry l’a conçue en collaboration avec Giovanni Mirabassi, pianiste et compositeur qui a écrit spécialement la chanson en question et des morceaux rendant hommage aux standards d’un Fats Waller et d’un Cab Calloway. Les musiciens ont joué live durant le tournage dans les boîtes de nuit : « les propriétaires nous ont autorisés à poser nos micros et à filmer […] Infiltrer ces concerts était à la fois amusant et très éprouvant ».

Et puis il y a l’irrésistible chanteuse et comédienne, Maria (aka Tatiana Eva-Maria). La révélation de ce long métrage. Cette suisse roumaine (cf. sa chanson « Girl from Bucarest ») installée à Big Apple crève l’écran, toute la deuxième partie durant. L’interprète semble par ailleurs déjà connue, puisque plusieurs clips d’elle sont visibles sur YouTube. Elle marque le film de sa photogénie et de ses multiples talents. Elle irradie la joie de vivre. Fantasque, avec ses robes à fleurs, ses longues boucles d’oreilles, sa chevelure d’ébène et sa bouche incarnat. Nous paraît a posteriori bien terne la demoiselle BCBG adepte de footing dont Théodore s’était épris à Paris…

Visuel : Tatiana Eva-Maria dans Swing Rendez-vous © Epicentre films.

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Nicole Gabriel

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