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Dans l’œil de Maria Helena Vieira da Silva

Dans l’œil de Maria Helena Vieira da Silva

20 December 2022 | PAR Laetitia Larralde

Trente ans après sa disparition, le musée des Beaux-Arts de Dijon, le musée Cantini de Marseille et la galerie Jeanne Bucher Jaeger rendent hommage à l’artiste franco-portugaise Maria Helena Vieira da Silva dans une exposition à deux entrées sur une œuvre complexe et cohérente.

Maria Helena Vieira da Silva (1908-1992), aussi appelée Vieira, est une artiste déterminée. Dès l’entrée de l’exposition, son autoportrait semble nous défier du regard, dans une attitude évoquant Frida Kalho. Dès ses onze ans, elle savait qu’elle deviendrait peintre et entre à l’école des Beaux-Arts de Lisbonne. Elle poursuit sa formation à Paris, où elle s’installe en 1928, en suivant les cours à l’Académie de la Grande Chaumière dans l’atelier d’Antoine Bourdelle. Son œuvre bascule très vite dans l’abstraction, sans jamais se rattacher à aucun courant artistique et cultivant sa singularité.

L’œil de l’artiste

La première partie de l’exposition, dans les salles consacrées au XXème siècle du 2ème étage, prend la forme d’une rétrospective de la carrière de Vieira. Si la chronologie se déroule clairement jusqu’à la seconde guerre mondiale et ses années d’exil, elle devient ensuite anecdotique jusqu’à la fin de sa vie. En effet, toutes les recherches tant de fond que de forme que l’on voit se développer, telles que les ossatures, les damiers ou la fusion du sujet et de la technique de représentation, arrivent alors à leur pleine maturation et s’extraient ainsi du temps. L’artiste a trouvé sa voix propre, son moyen d’expression unique.

Si dans certaines de ses toiles, on peut lire des parentés avec d’autres artistes de son époque, Vieira da Silva n’a jamais cherché qu’à se peindre elle-même. Ses toiles, petites ou grandes, regorgent de petites touches de pinceau qui construisent patiemment les architectures de ses œuvres. Villes ou labyrinthes, elle tisse l’espace en entremêlant le réel à ses souvenirs personnels et à sa perception subjective. Et même quand sa palette s’éclaircit jusqu’à l’évanescence, sa touche reste dense et précise, suivant la structure de ses grilles même quand celle-ci s’efface.

L’œil des collectionneurs

Au RDC, la seconde partie de l’exposition se concentre sur le lien entre le couple de collectionneurs Kathleen et Pierre Granville avec Vieira da Silva et son mari Arpad Szenes. Si le musée des Beaux-Arts de Dijon a aujourd’hui dans ses collections un nombre si important d’œuvres de Vieira, c’est grâce aux donations des Granville. Les œuvres présentées ici sont plus intimes, avec de nombreuses œuvres sur papier, dessins, gravures ou aquarelles. L’amitié des deux couples se lit sur les cartes postales, les photos et les cadeaux tels que cette boîte aux lettres personnalisée pour les Granville.

Ici, nous abordons l’art de Vieira da Silva par des angles bien moins habituels. On aperçoit une partie de ses recherches sur d’autres supports et techniques, ainsi que la place que l’art prend dans sa vie, elle qui, enfant, avait détruit tous ses dessins, les jugeant trop immatures. Avec la totalité de ses œuvres des collections du musée présentée ici, quasiment toutes issues de la donation Granville, on se rend également compte des goûts des collectionneurs. Ils n’ont pas cherché à être exhaustifs, mais ont choisi d’acheter selon leurs inclinations et la surface réduite de leur appartement, préférant les petits formats ouvrant sur l’intimité et l’imaginaire. Enfin, au travers de l’histoire des Granville, c’est également l’histoire du musée des Beaux-Arts de Dijon qui se devine.

Si Maria Helena Vieira da Silva avaient été un peu oubliée à partir des années 1990, sa renommée de son vivant était vérifiée en France, au Portugal et à l’international. Aujourd’hui, la fascination que son œuvre exerce retrouve un nouveau souffle avec cette belle exposition qui nous démontre la modernité affirmée d’une œuvre à la fois forte et délicate, complexe et pourtant si simple à s’approprier.

 

Maria Helena Vieira da Silva – L’œil du labyrinthe / L’œil des collectionneurs
Du 16 décembre 2022 au 03 avril 2023
Musée des Beaux-Arts de Dijon

Visuels : 1- Grande chambre bleue, gouache et peinture à l’huile sur panneau d’isorel, 1951 © Musée des Beaux-Arts de Dijon/François Jay, © ADAGP, Paris 2022 / 2- Intérieur rouge, huile sur toile, 1951 Donation Pierre et Kathleen Granville, 1969 © Musée des Beaux-Arts de Dijon/François Jay © ADAGP, Paris 2022 / 3- Cathédrale engloutie, aquarelle sur papier, 1949 Donation Pierre et Kathleen Granville, 1969 © Musée des Beaux-Arts de Dijon/François Jay © ADAGP, Paris 2022 / 4- La ville au bord de l’eau, huile sur toile, 1947 Donation Pierre et Kathleen Granville, 1969 © Musée des Beaux-Arts de Dijon/François Jay © ADAGP, Paris

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Laetitia Larralde
Architecte d'intérieur de formation, auteure de bande dessinée (Tambour battant, le Cri du Magouillat...)et fan absolue du Japon. Certains disent qu'un jour, je resterai là-bas... J'écris sur la bande dessinée, les expositions, et tout ce qui a trait au Japon. www.instagram.com/laetitiaillustration/

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