
Cinq jeunes artistes dignes d’attention
Ils et elles sont chanteurs, chanteuses, musiciens, metteuse en scène, tout juste émergents sur les réseaux sociaux ou dans quelques théâtres parisiens, et n’ont pas trente ans. Voici une sélection de cinq jeunes artistes/groupes très prometteurs qui pourraient prendre la relève sur la scène française en jazz, chanson française, théâtre et polyphonie vocale.
Putzatinit
Sarah Retno Dumilah Bordes (25 ans, alto/mezzo), Suzie Ripoche (à peine 22 ans, soprano) et Ludivine Clodong-Berger (25 ans, soprano) sont un trio vocal polyphonique a cappella. Pourquoi “putzatinit” ? “Ca vient de l’anglais “put that in it”, “met ça là-dedans”, m’explique l’une d’entre elles. “C’est parti d’une conversation messenger où on se dit tout, on met tout, et on voit ce qui se passe. Le concept de notre groupe est dans la même veine ; on chante ce qui nous fait plaisir, des délires d’ado des années 2000 ou du Wejdene… on chante un peu ce qu’on veut et ce qui nous fait plaisir dans ce projet.” Elles ont “percé”, comme on dit, sur Tik Tok, avec une composition : “j’ai envie de cul et de clopes”. Langage peu châtié donc, qu’on retrouve dans “Les menstrues”, dernière vidéo sortie sur Tik Tok, Instagram et YouTube. Elles y chantent un texte des plus grivois en roulant les “r” comme s’il s’agissait d’une pièce classique de musique religieuse – ce décalage entre sujet “bas” ou “trivial” et traitement d’un style élevé, qu’on appelle l’héroï-comique, est hilarant. Auparavant, elles avaient sorti une cover de Jena Lee, “J’aimerais tellement”. Leurs compositions se contentent de quelques vers bien sentis chantés en boucle, mais en une sorte de canon, par exemple, entre thème et variations et circle song. On peut comprendre ce succès : leurs paroles sont aussi drôles que trashs, d’un grivois féminin, ce à quoi nous sommes peu habitués – quoique l’on peut penser à Colette Renard -, et les trois chanteuses sont très musiciennes, dotées d’une solide technique vocale, les arrangements harmoniques sont originaux… on a naturellement envie de savoir d’où sortent ces trois extraterrestres !
Elles font ou ont fait toutes les trois partie du chœur Mikrokosmos, chœur de 40 jeunes mixte et a cappella dirigé par Loïc Pierre à Vierzon, où elles sont devenues amies, et de l’ensemble vocal Syllepse à Lyon, dirigé par Ophélia Besson (musique ancienne et contemporaine a cappella). L’idée du trio a émergé en mars 2021, et l’été suivant elles ont commencé à travailler sur Jena Lee.
Sarah a étudié en hypokhâgne/khâgne au lycée Fénelon à Paris ainsi qu’au conservatoire d’art dramatique Frédéric Chopin à Paris 15.
Ludivine a rejoint Mikrokosmos à seulement 16 ans, en 2012, alors qu’elle était au lycée Edouard-Vaillant, ce qui faisait d’elle la plus jeune chanteuse du choeur. Elle avait débuté le chant à l’âge de six ans au conservatoire de Vierzon. Après des études en langues à l’université d’Orléans (Loiret), elle comptait devenir professeure d’anglais et devient finalement correctrice en anglais, français et allemand et relectrice et correctrice free-lance à Tours.
Suzie Ripoche est née d’un père musicien et d’une mère comédienne – comme quoi, les gènes y sont pour quelque chose. Elle prend des cours de chant dès son plus jeune âge en école de musique et découvre son amour de la scène au lycée. Elle ne s’épanouit pas dans les conservatoires et décide donc de se former auprès de professeurs particuliers. Elle rencontre ainsi Myriam De Aranjo, la coach vocale de Mikrokosmos, en 2018. Cette dernière l’invite à aller voir “La Nuit Dévoilée” et le coup de coeur est immédiat pour Suzie. Elle intègre le Choeur fin 2018. Depuis l’été 2021, elle devient assistante à la mise en scène et prend la relève d’Hélène Gendeck sur les ateliers “Corps poétique” avec Marianne Belijar. Elle y trouve un espace fertile pour approfondir le travail du corps dans l’espace ou la présence scénique, renforçant sa sensibilité et sa passion pour les arts de la scène. Ses projets artistiques allient la musique, la danse, le théâtre et l’écriture poétique. Aujourd’hui, elle se forme également au théâtre auprès d’Agnès Jobert et à la danse auprès de Nicolas Irurzun à Nantes.
Un trio tout neuf à suivre de près, donc : on attend les singles, albums et dates avec impatience. L’une habitant à Tours, l’autre à Lyon et une autre à Nantes, se voir n’est pas toujours évident ; mais cet été, elles ont préparé ensemble un set de 15 minutes qu’elles ont fait tourner dans la rue. Un EP est en prévision…
Tik Tok : @putzatinit_officiel
Instagram : @putzatinit
YouTube : PUTZATINIT
Samuel Devin
Originaire d’Evreux dans une famille de musiciens amateurs, le chanteur et saxophoniste de 24 ans a commencé par du chant lyrique et du saxophone jazz en conservatoire. Il a appris la guitare en autodidacte à onze ans pour pouvoir chanter du Brassens. En effet, à la fois inspiré par le jazz et la chanson française, habitué du Club des Poètes, Samuel Devin est également un littéraire sensible à la chanson à texte à laquelle il s’adonne brillamment, ainsi qu’au conte.
Vous pourrez vous en rendre compte en écoutant son premier EP sorti en mai 2022, “Je chante par couverture”, sorti en CD et en vinyle et disponible sur toutes les plateformes de streaming. On y trouve ses propres compositions comme “la musette”, mais également des poèmes mis en musique comme le titre éponyme du disque, une ballade écrite par Christine de Pisan au XIVe siècle.
Chez l’auteur-compositeur-interprète, on entend les influences de chanteurs comme Nougaro, Aznavour, mais aussi des nouveaux chanteurs de variété tels qu’Yves Jamait ou André Minvielle. Il frappe par la délicatesse de son phrasé, de ses nuances, par son expressivité aussi bien physique que musicale, son excellente élocution et l’inventivité de ses harmonies comme de ses lignes mélodiques.
Après avoir étudié un an en musicologie à la Sorbonne, il voyage, joue dans une troupe de cirque et dans la rue depuis ses 17 ans.
Il est accompagné depuis 2021 par trois musiciens et amis : Léonard Pauly à la contrebasse, Philippe Dallemagne à la batterie et Antoine Soler à la guitare. Retrouvez-les d’ailleurs le jeudi 8 septembre à 20h30 à Comédie-Nation (réserver) pour un spectacle musico-poétique de 70 minutes.
Ici, une de ses chansons avec la chanteuse et cheffe de choeur Chloé Breillot :
Elise Vassallucci
Mère professeure de lettres mais également saxophoniste et accordéoniste amatrice et père professeur agrégé d’économie mais également chanteur, guitariste et comédien amateur, c’est grâce à ce dernier qu’Elise Vassallucci s’initie à la chanson française. Brel, Piaf, Louise Attaque, Noir Désir, Juliette, Joe Dassin… Comme quoi, la qualité s’apprécie souvent chez les jeunes musiciens issus de parents eux-mêmes musiciens, qu’ils soient professionnels ou amateurs.
Elise Vassallucci fait du violon classique en conservatoire de ses cinq à ses 17 ans et entre en hypokhâgne après un bac L, en continuant (difficilement) avec le conservatoire où elle commence le jazz, auquel elle se consacre finalement à plein temps. Elle donne des cours, fait des formations et apprend le chant grâce au jazz et à deux grands professeurs, Monique Zanetti et Jean-François Bonnel. Puis elle rencontre Pierre Gueyrard avec lequel elle fait un atelier de chanson française au conservatoire d’Aix : “le cours avec lequel j’ai le plus grandi, un des cours qui m’a le plus appris avec les cours de jazz”, affirme-t-elle. Les musiciens avec lesquels elle joue aujourd’hui sont ceux qu’elle y a rencontrés et qui l’accompagnaient pour ses examens de chanson française : Pierre Mikdjian au piano, Nghia Duong à la contrebasse et Léo Achard à la batterie. Ils se sont produits au “Marseille jazz des cinq continents” et ont écrit deux EP ensemble, “La mer qui divague” et, récemment, “Fuveau”, aux lignes mélodiques et chorus inventifs. Elise Vassallucci prépare en ce moment son premier album…
En attendant, vous pouvez aller l’écouter le 24 septembre pour la fête swing du Zoumaï avec le massilia swing orchestra à 20h (Marseille) et le 12 octobre 2022 au C2 à Marseille à partir de 20h.
Pour production, diffusion et communication, contacter CreAgency
Lorena Bénichou
Lorena Bénichou a étudié en CPGE littéraire au Lycée Thiers puis à Henri IV à Paris, avant d’intégrer l’ENS Ulm en spécialité espagnol en 2020. Depuis 2021, elle est également inscrite aux cours Florent. La Compagnie de l’Autre Langue (que vous pouvez suivre sur Facebook et Instagram) fut créée en octobre 2021 avec des amis de l’ENS, des cours Florent et des intermittents du spectacle : ils étaient 15, ils sont à présent 35 membres permanents. Elle fut créée avec Julie Barrazza comme co-présidente pour jouer “Je reviendrai – Antigone”, première pièce qu’elle voulait jouer en dehors du théâtre universitaire. “On y est allé au culot”, m’explique la jeune femme de 23 ans, “c’est-à-dire qu’on a écrit à plein de théâtres”. Hé bien, c’est ainsi que ça fonctionne : de février à mai 2022, la compagnie joue douze représentations de la pièce au Théâtre du Gouvernail.
Par la suite, Lorena découvre en cours la pièce “Tumultes” de Marion Aubert et là, c’est la révélation : elle a déjà des idées de mise en scène. Parmi les théâtres auxquels elle écrit pour cela, cinq la recontactent, mais parmi eux deux donnent des dates trop tardives. Deux autres ont des salles trop petites pour le nombre de comédiens. Finalement, elle convient avec la Comédie Saint-Michel de 66 représentations dans la Grande Salle. Sauf que les droits à payer pour tant de représentations d’une pièce dont elle n’est pas l’autrice coûtent cher, ce qui n’est pas possible avec les costumes, décors à payer… alors, on lui propose de jouer 33 représentations de cette pièce et 33 de la sienne, qui serait donc jouée dans une salle à 140 places contre 50 au théâtre du Gouvernail… elle ne dit pas non.
La compagnie jouera donc deux soirs par semaine à partir du 2 novembre : les mercredis, ce sera “Tumultes” à 21h30 (1H30) et les jeudis, “Je reviendrai – Antigone” (1h) à 19h30.
“Tumultes” raconte l’histoire de neuf étudiants en théâtre déboussolés face au monde actuel et qui décident de préparer une révolution. Les préparatifs sont l’occasion pour eux de se découvrir, de questionner leur existence et d’imaginer un monde dans lequel ils ont envie de vivre. En l’absence de modèles contemporains, ils font appel à de grandes figures du siècle dernier. Ils s’activent, s’animent, tombent amoureux, se blessent et se découvrent dans cette comédie qui dépeint une génération de jeunes en quête de sens face au monde actuel. Une question reste centrale : quel rôle le théâtre a-t-il à jouer dans notre rapport au monde ? (réserver)
Mise en scène de Lorena Bénichou assistée d’Oscar Clermont, avec : Guillaume Auburtin, Julie Barrazza, Lorena Bénichou, Oscar Clermont, Maxime Djordjalian, Maxime Dos Anjos, Morgane Frioux, Robin Havard, Emma Laurent, Nadia Minaud, Romane Ortali, Nathan Prieur, Clara Schuster, Marie-Camille Valot et Charlène Varoquier.
Dans la version d’Antigone de Lorena Bénichou, Antigone part aux Enfers pour parler une dernière fois à son frère. “Prise entre la danse des vivants et le chant des morts, reviendra-t-elle ?”, peut-on lire sur le site (réserver). “Un choeur de soeurs qui ont perdu un frère sans avoir le droit de l’enterrer. Mise en lumière de l’une d’entre elles, notre Antigone, qui n’est plus une figure politique mais l’incarnation lyrique du deuil. L’ombre de l’absent, ce frère à qui elle n’a pas pu tout dire, plane sur la pièce. A l’impossibilité de dire se mêle la volonté d’une dernière fusion, poussant l’héroïne à traverser le deuil dans un voyage aux Enfers. Un choix, sans cesse, se pose : rester ou revenir. Une réécriture contemporaine du mythe d’Antigone, dans une scénographie où s’entremêlent chant et danse, révélant toute la dualité et la sensibilité de ce personnage.”
C’est cette impossibilité de tout dire qui a conduit Lorena Bénichou à utiliser la danse pour exprimer ce que les mots, eux, ne pouvaient plus exprimer. Elle a reçu l’aide chorégraphique de Léo Regnier pour le rock à quatre temps et de Diane-Iris Ricaud (également élève à l’ENS) et Julie Barrazza pour le contemporain. En plus de ses brillantes études, Lorena a en effet derrière elle dix ans de danse classique, quinze ans de modern’jazz, sept ans de contemporain et un an de salsa et de rock. On a du mal à concevoir comment de tels esprits pourraient produire autre chose que des merveilles…
Avec : Agathe Arribart, Julie Barrazza, Loïs Belles, Lorena Bénichou, Anaëlle Briat, Julia Calliès, Marguerite Cassegrain, Pauline Cayatte-Leeb, Marie-Victoire Collin, Antoine Dauvergne, Mathieu Delacour, Anne-Laure Delaittre, Mathilde Heerman, Ariane Lebrun, Paolo Montanini, Nadia Minaud, Nathan Prieur, Sarah Rob, Clara Schuster, Marie Sigallon et Charlène Varoquier.
Solann
“Ma passion pour la musique me vient sans doute de ma mère”, explique la jeune artiste. Elle chante d’une voix juste, fine et cristalline en s’accompagnant au piano ou au ukulélé et poste sur ses réseaux sociaux (Tik Tok et Instagram) des reprises de Barbara ou Brel, ou bien ses propres compositions. Artiste complète, Solann a également joué dans plusieurs courts-métrages et pièces de théâtre et a suivi une formation à l’école du théâtre et de l’image La Générale à Montreuil. Elle n’a encore sorti aucun EP ou album, mais ces projets sont en préparation… “Je me balade entre le théâtre, le cinéma et la musique. Fille de comédien – François Lis – et de costumière, j’ai grandi entre les répétitions de Molière, Maupassant et Pinter et entre la caverne d’Ali Baba qu’était l’atelier de ma mère (il aurait été surprenant pour moi d’entrer dans le monde de l’orthodontie)”, écrit-elle avec humour.
Sur Instagram, on la découvre également modèle photo. Ses clichés sont à l’image de son univers musical : doux, féériques et élégants.
Tik Tok : @solannzelie
Instagram : @solannlisamboyan
Visuel : affiche officielle du spectacle “Je reviendrai – Antigone”