
Le renard envieux qui me ronge le ventre de Millie Duyé
Après l’indispenasble Provisoire(s) sur la question des réfugiés la nouvelle pièce de la Compagnie des Entichés se saisit de la question impossible du genre. À la confusion des discours, ils ajoutent une joyeuse contribution dans un geste poétique.
L’écriture de plateau orchestrée par la brillante Millie Duyé a crée ceci de magique que le texte a manifestement pris le temps de s’inscrire dans l’esprit et le jeu des comédiens; libérée de l’anxieuse question de la légitimité la troupe s’autorise une économie de procédés de mise en scène. Convaincus leurs jeux rend chaque motif efficace. Leur écriture du trouble identitaire repère sa modalité la plus sombre pour le déplier tout au long de la pièce : celle de l’identification à l’agresseur. Les personnages suivent un parcours mental où d’abord victimes des normes sociales, ils se transforment eux-mêmes en bourreaux. Car peut-être il ne leur reste d’autre choix.
Le titre de la pièce est emprunté à une anecdote de Plutarque. Dans l’Enfant au renard les enfants se dérobent à la loi. L’un d’eux ayant pris un renardeau qu’il avait caché sous sa robe et craignant d’être découvert, se laissa déchirer le ventre par l’animal à coups d’ongles et de dents, sans jeter un seul cri. Il préférera mourir plutôt que d’être découvert.
SI les enfants sont l’avenir de notre société, alors les jeux d’enfants sont le lieu des schémas aliénant, mais aussi des ruptures salvatrices. Un des jeux d’enfants se finit par cette résignation : C’est toujours les princes qui gagnent ». Le premier baiser d’une adolescente se termine par la violence patriarcale et machiste : T’es vraiment une allumeuse ! Deux parents expliquent la puberté à leur fille en commençant par la phrase Les filles et les garçons, on n’est pas pareils. On en est là et rien ne prédit que les choses s’inclinent.
Chaque scène est une constatation et un manifeste. Sous forme de tableaux ponctués d’interludes et habillés d’une musique moderne, les cinq comédiens prêtent leur dynamisme à leurs convictions. On quitte la pièce en ayant beaucoup ri (une scène d’accouchement est hilarante). On la quittera également avec une sensation douce amère que les consciences changeront par le temps et le courage.
Une pièce drôle jeune et vertueuse sans crânerie
Le 8 et 9 février
PARIS ANIM’ LES HALLES LE MARAIS
6/8 Place Carrée
Durée : 95 minutes
Compagnie : Cie Les Entichés
Écriture et mise en scène : Millie Duyé
Interprété par : Thomas Bouyou, Mélanie Charvy, Émilie Crubezy, Charles Dunnet, Loris Reynaert
Création lumières : Tanguy Gauchet
Musique : Korfall
Création chorégraphique : Clément Victor
Réalisation décors : Marion Dossikian
Aide à la dramaturgie : Romain Picquart
Public : dès 15 ans