Théâtre
“Le pays lointain (un arrangement)”, Christophe Rauck met la famille dos au mur au Festival d’Avignon

“Le pays lointain (un arrangement)”, Christophe Rauck met la famille dos au mur au Festival d’Avignon

20 July 2018 | PAR Amelie Blaustein Niddam

Le spectacle de sortie de la promotion 5 de l’Ecole du Nord arrive au Festival d’Avignon. Christophe Rauck monte de façon juste et lumineuse le dernier texte de Jean-Luc Lagarce, Le Pays Lointain.

“Comme un lego”. On entendra le titre de Bashung plus tard mais l’image est là. Une construction faite de panneaux blancs linéaires qui font décor. Une histoire qui manque le coche : celui d’un aveu. Ce texte que Jean-Luc Lagarce a achevé une semaine avant sa mort en septembre 1995, comme la dernière pièce de sa construction.

Peio Berterretche, Claire Catherine, Morgane El Ayoubi, Caroline Fouilhoux, Alexandra Gentil, Alexandre Goldinchtein, Victoire Goupil, Corentin Hot, Margot Madec, Mathilde Méry, Cyril Metzger, Adrien Rouyard, Etienne Toqué et Mathias Zakhar sortent de l’excellente formation de l’Ecole du Nord. Ils vont camper les vivants et les morts, tous ceux que l’auteur de Juste la fin du monde convoque pour son dernier repas en famille.

C’est l’histoire de la mort d’un homme jeune et qui veut le dire, et qui ne le dira pas. Pour la pièce et sous le regard de Christophe Pellet, parrain de promotion, les élèves ont intégré d’autres textes : J’étais dans ma maison et j’attendais que la pluie vienne, Nous les héros , Journal 1 et 2.

Il y a ici une idée à la seconde. D’abord, l’idée d’éclairer à la lampe de poche Lagarce (Alexandra Gentil) en train d’écrire, puis ces panneaux qui transforment l’espace en une seconde : la cuisine ou le salon, l’extérieur de la maison… et qui sont le support de vidéos qui illustrent le lieu où l’on se trouve. Et surtout il y a le jeu, tellement parfait, tellement loin de tout académisme, tellement libre, chacun dans leur jus. Etienne Toqué en Louis et Mathias Zakhar sont particulièrement époustouflants pour leur distance vis-à-vis du texte.

Les aller-retour entre la fiction ( Louis revenant à la maison ) et la pièce en train de se faire sont bien pensés, sans heurts. On circule bien et le plateau est très bien utilisé, avec pas grand chose. On avance dans cette tragédie dont un seul connait l’issue, dans une ambiance Ok Corral : la mère (Victoire Goupil) balance à son fils qu’elle ne sait pas où il habite, la petite sœur Suzanne (Mathilde Mery), bien speed, balance à son aîné que non, “tout le monde ne prend pas la fuite”.

Le mot Sida n’est jamais cité même quand défilent “tous les amants” et les guerriers (Corentin Hot, Alexandre Goldinchtein) et pourtant la maladie est partout, injuste. L’homme qui meurt à 39 ans, bientôt 40, seulement. Alors, en plus de convoquer son père mort (Peio Berterretche) il appelle les copains (Cyril Metzger, Morgane El Ayoubi) qui assistent au pugilat entre Louis et Antoine (Adrien Rouyard). Et puis il y a les autres figures féminines, la belle sœur qui tente de relationner (géniale Claire Catherine), la sœur Béatrice (Caroline Fouilhoux) et l’incroyable Margot Madec qui campe une espèce de chœur en la figure ultra théâââtrale de Madame Tschissik.

En résumé, nous sommes face à des comédiens excellents et particulièrement professionnels qui portent avec une dose d’humour, de profondeur et de finesse ce testament si puissant.

Visuel : Le Pays lointain (un arrangement) © Simon Gosselin

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