Théâtre
“Liquidation” au Théâtre du Nord : une mise en scène inégale de Julie Brochen

“Liquidation” au Théâtre du Nord : une mise en scène inégale de Julie Brochen

15 February 2015 | PAR Audrey Chaix

Dans la Hongrie des années 1990, B., un écrivain, se suicide dans sa chambre. Son éditeur, Keserü, est persuadé qu’avant de mourir, B. a écrit un roman qu’il veut absolument retrouver. Il se lance alors dans la quête du manuscrit, faisant ainsi resurgir du passé de durs souvenirs de la Shoah. Car au fond, l’enquête elle-même importe peu : c’est ce qu’elle révèle qui crée peu à peu le fil d’une histoire douloureuse. 

Pour cette mise en scène, Julie Brochen a choisi d’adapter un roman de l’auteur hongrois Imre Kertész, prix Nobel de littérature en 2002. Paru en 2004, Liquidation raconte ce qui n’est pas racontable, cette marque brûlante de l’Holocauste laissée sur les survivants et sur leurs descendants. Saisie par une “déflagration lumineuse” à la lecture de ce texte, Julie Brochen l’a adapté pour sa dernière création comme directrice du TNS afin d’en proposer une version scénique portée par les comédiens de la troupe du TNS (en très grande majorité). Une adaptation intéressante, mais malheureusement inégale.

En effet, scénographie et lumières créent une très belle ambiance pour cette Liquidation, dont les couleurs chaudes plongent le spectateur dans l’univers des livres et des librairies. Les éléments de décor, montés sur roulettes, sont manipulés à chaque changement de scène, ce qui donne une grande mobilité au plateau.

En revanche, la pièce paraît inégale, avec des longueurs qui nuisent au propos, pourtant très fort. L’adaptation scénique du roman reste difficile à suivre et à mettre en scène : les dialogues entre les personnages sont étrangement construits, avec un procédé de narration qui met dans la bouche des comédiens, des paroles d’auteur très écrites, comme si chaque personnage racontait sa partie de l’histoire au lieu de l’interpréter. Cela crée une véritable distance entre les mots et le plateau, et empêche le spectateur de se laisser happer par le jeu des comédiens, constamment rappelés à leur condition d’intermédiaires entre la scène et la salle.

La seconde partie de la pièce, dominée par l’excellent monologue de Fanny Mentré, qui interprète l’ex femme de B., apparaît moins fastidieuse que la première partie. C’est surtout grâce à la présence bouleversante de Fanny Mentré, qui transcende ces difficultés liées à l’adaptation du texte pour la scène : elle le prend à bras le corps pour livrer une incarnation de Judit aussi juste que prenante. Remarquable.

Photos : © Franck Beloncle

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