Théâtre
Les Barbelés mise en scène Alexia Bürger à la Colline

Les Barbelés mise en scène Alexia Bürger à la Colline

16 November 2017 | PAR David Rofé-Sarfati

La pièce canadienne Les Barbelés est un seul-en scène écrit par Annick Lefevre, mise en scène par Alexia burger et interprété par Marie Eve Milot. La pièce inquiétante trouve naturellement son lieu de création chez Wajdi Mouawad à la Colline. Et le public reste scotché. 

[rating=4]

 

L’histoire de la femme quelconque.

Une femme dans un fragment de cuisine épluche des oranges. Elle témoigne dans une colère à peine cachée par une retenue de bienséance. Elle témoigne d’elle même. Elle est une mère de famille, une citoyenne responsable ; elle mange du kale, s’indigne sur Facebook, signe des pétitions en ligne, aide une famille syrienne à s’installer au Québec, elle raconte la norme des nouvelles conventions et en creux une société de l’immédiateté de la tiédeur et des faux semblants.

Parce que des fils barbelés lui poussent dans le corps, que sa gorge et sa bouche en seront bientôt envahies cette femme va voir émerger en elle l’urgence de la parole. Elle voudra dire ces mots qui veulent saisir l’ultime de sa vie. Elle voudra prononcer les mots trop longtemps censurés, les mots qui débordent. Les barbelés poussent en elle, car chaque fois qu’elle a renoncé à dire, par convention, par bienséance, par pudeur ou par réflexe les fils de fer acérés ont progressé.  Aujourd’hui, il ne lui reste plus qu’une heure à parler.

Le texte est fort, son interprétation théâtrale et la performance de Marie-Ève Milot le transforment en une claque mentale dont on ne sort pas indemnes. La  mise en scène d’Alexia Bürger est efficace et vient recueillir et accompagner la logorrhée anxieuse de Marie-Ève Milot.

La pièce est une métaphore incarnée de la névrose lorsqu’elle flirte avec la folie.

La scène finale est un choc. Plus cette femme colère, invective dénonce s’oppose, plus ses mots clairvoyants affrontent enfin la réalité et plus les barbelés l’emprisonnent, de l’intérieur puis de l’extérieur enveloppant son corps. Car à trop vouloir en savoir de sa propre condition l’individu devient quitte l’anxiété pour devenir fou, ses mots deviennent testament.

Les trois Canadiennes se sont attaquées avec talent à ne pourchasser rien d’autre que le signifiant de la mort s’il existe. C’est formidablement désarmant et Marie-Eve Milot y est bouleversante.

 

Les Barbelés
texte Annick Lefebvre
mise en scène Alexia Bürger
avec Marie?Ève Milot

 

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