Théâtre
[Festival d’Avignon] Antônio Araújo nous entraîne dans les méandres des crises européennes

[Festival d’Avignon] Antônio Araújo nous entraîne dans les méandres des crises européennes

14 July 2014 | PAR Amelie Blaustein Niddam

C’était l’un des spectacles les plus attendus du Festival d’Avignon. Dire ce qu’on ne pense pas dans des langues qu’on ne parle pas mis en scène par le brésilien Antônio Araújo témoigne d’un génie dramaturgique, mais…

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Il y a l’horaire : minuit. Il y a lieu que personne, même pas les Avignonnais de naissance ne connaissent : l’Hôtel des monnaies. Il y a une alliance de villes : Bruxelles où le spectacle a été créé Avignon où il a lieu et São Paulo où, tous espèrent, il aura lieu.  Il y a, dans la proposition même, du rêve.

Nous voici dans le quartier de la Balance, au pied du quartier Juif Médiéval, “la carrière”. Une façade majestueuse va être l’aire de jeu verticale de quinze comédiens. Le spectacle est déambulatoire et nous allons pénétrer au fur et à mesure dans un drôle d’espace qui mène de l’élégance à la chute, le tout avec une vue, à un moment sur le Palais des Papes et la banderole que les intermittents y ont accroché.

La scénographie est une bombe, chaque centimètre carré de cet immeuble à passages est utilisé, dans toute sa surface. Mais que nous raconte-t-on ? Finalement, une histoire plus simple qu’il n’y paraît.

Claire Bodson est “la fille”, elle est économiste et part dans un pays lourdement en crise faire une conférence. Elle y emmène son père (Didier de Neck) qui est devenu muet à la mort de sa femme et qui n’est pas revenu au pays depuis 40 ans.

La pièce est la quête de sa voix. Elle va chercher, auprès de spécialistes à le faire soigner jusqu’à ce qu’il disparaisse.

Nous entrons alors dans une enquête, où l’on croise l’excellent Jean-Pierre Baudson en commissaire et où la fille s’embourbera dans la lie d’une société en vrac où les socialistes sont devenus des fascistes, où des tueurs rodent, et où elle risque sa vie.

Si la scénographie est une merveille d’ingéniosité et de technique, qui vaut spectacle, le texte de Bernardo Carvalho, habitué des “fictions documentées” se perd dans les schémas identiques nécessaires à la proposition qui s’ancre quasiment dans un jeu de rôles.

Les transitions entre les scènes sont incompréhensibles, faites de violence, cela est une belle idée, mais dont la traduction sur ce plateau étrange est peu efficace. Le jeu cafouille souvent, du fait même de la circulation très acrobatique : il arrive régulièrement que des comédiens doivent se hisser haut et que la visibilité ne soit pas optimale. Le spectateur se contorsionne, rate des sous-titres, ne voit pas plusieurs scènes.

Plusieurs broutilles accumulées provoquent une lassitude face à la proposition et à l’écoute d’un texte qui puise trop dans l’énergie des séries et s’inscrit dans une tendance forte du théâtre actuel qui est rarement bien exécutée. On pense à Une Faille de Mathieu Bauer ou au plutôt bon Soda de Kerszenbaum, tous tombent dans l’écueil de pièces trop longues, où le sur-jeu est tenace.

Pour comprendre les crises en Europe et la prise du pouvoir non fictionnelle par l’extrême droite il aurait fallu resserrer le spectacle qui s’avère trop ambitieux pour un texte qui n’est pas à la hauteur de l’idée.

Retrouvez le dossier Festival d’Avignon 2014 de la rédaction

Visuel : © Christophe Raynaud de Lage

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