
« Déclic », une pièce sur le deuil qui nous parle de la vie au Théâtre de Belleville
Jusqu’au 14 novembre, le théâtre de Belleville nous invite à réfléchir avec Déclic de Claire-Sophie Beau. Une pièce sur le deuil qui nous parle de la vie.
Hadrien, un jeune photographe parisien talentueux mais un peu paumé, vient de perdre sa mère. Elle était juive, son père non. Hadrien, qui a été élevé sans rien, se voit soudain sommé de performer des rites juifs qui lui sont inconnus, de se plier à un cérémonial de deuil à Jérusalem où il met les pieds pour la première fois, et de recevoir à Paris dans des synagogues inconnues des inconnus qui viennent lui présenter leurs condoléances avant de se ruer sur le buffet. Dans cette pièce aux accents autobiographiques, personne n’est parfait. Ni le père, dans ses généreuses tentatives maladroites d’honorer la mémoire de sa femme dans ce monde juif qui lui est étranger, mais qui, croit-t-on deviner avec Hadrien, se console peut-être déjà depuis un moment dans les bras d’une autre ; ni l’exquise tante Rachel, qui à grands renforts de « a’Ima » (« maman… ») de sa Tunisie natale, n’est pas exempte de clichés anti-goyim qu’elle sort avec une candeur égale à l’amour dont elle déborde. Ni notre « héros » lui-même, qui vire sa copine sans un mot et reçoit la sollicitude de son meilleur pote avec l’hostilité latente de ceux qui n’arrivent pas à comprendre leur douleur. Cette pièce sur la mort, c’est une pièce sur les liens humains. Leur complexité, leur ambivalence souvent, leur fragilité, leur délitement si facile, et leur fidélité, pourtant … Au-delà de l’histoire d’un deuil, c’est aussi celle d’une génération de jeunes adultes né à la fin du XXe siècle et qu’on appelle aujourd’hui les « adulescents » : les adultes-adolescents ; une génération qui, à l’image d’Hadrien, a du mal à prendre sa place, à « se faire une vie » – professionnellement, amoureusement, contrairement à ses parents qui se posaient moins de questions et faisaient aussi plus de compromis. Mais il faudra bien en faire quelque chose, de cette vie, nous dit la metteuse en scène de « Déclic », la jeune auteure Claire-Sophie Beau, à travers la bouche de l’oncle, un enfant caché qui a bien connu le deuil. « Il n’y aura pas de miracle », finira-t-il par dire à son neveu boudeur. « Il faudra se relever ». Et se lever pour applaudir les six comédiens incroyablement vrais et touchants qui incarnent avec brio toutes ces facettes d’une vie, la nôtre peut-être. À voir absolument.
Déclic, au théatre de Belleville, du 5 au 14 novembre 2017.
http://www.theatredebelleville.com/prochainement/item/382-d%C3%A9clic
Mira Niculescu