
Avignon OFF : La proche “Liberté” de Frederic R. Fisbach
Créé pendant le confinement, pour les collèges et lycées, Liberté se joue au 11, dans une vraie salle de classe du Lycée Mistral. Le texte de Yann Verburgh est déployé au plus près par la mise en scène subtile de Fre?de?ric R. Fisbach.
Rappelez-vous, durant le confinement, il était interdit d’aller au théâtre, mais il était autorisé d’aller, au choix, prier, signer un contrat d’assurance ou acheter un téléphone en boutique. Dans la série des folies, à un moment, le gouvernement a autorisé que les spectacles se tiennent en milieu scolaire pour les élèves. Cela a donné naissance à pas mal de très bonnes pièces, dont Liberté, pensé donc pour une adresse aux adolescent.es.
Nous voici, pour la grande majorité du public, de retour au lycée bien longtemps après l’avoir quitté. Sophie Claret joue la prof et Nicolas Dupont l’élève, en gardant leurs prénoms. Le cours du jour porte sur la liberté d’expression, ou plus exactement le droit à la caricature. Le contexte est tendu, la leçon fait écho à la décapitation de Samuel Paty. Nicolas, l’élève, cherche la prof et la trouve. Les choses se tendent. En dix séquences, le spectacle nous entraîne dans les choix cornéliens des enseignants face à un système en ruine.
La proximité de jeu du comédien et de la comédienne est troublante. Il et elle sont au cœur de cet espace étroit qu’est la salle de classe. Liberté pointe sans stéréotypes ni idées reçues les limites de chaque protagoniste en posant la question de la liberté d’expression dans un espace dans lequel la hiérarchie est tout le temps présente.
Dans sa version “normale”, la pièce permet de décentrer le lieu qu’est la classe pour en faire autre chose, un imaginaire. La classe devient un parc, une manif pour le climat, un appartement, un autre appartement, la salle des profs, une autre classe, juste en le disant. C’est la magie du théâtre. La bonne idée du 11 est d’avoir gardé cet esprit de décadrage en présentant la pièce dans des conditions scolaires.
Une belle déclaration d’amour à l’intelligence des profs, des élèves et dans l’éducation. Toute en subtilité, la pièce permet de parler sans tabou de grands sujets tels que le deuil et l’homosexualité qui résonnent forcément face à un public adolescent, moins disposé à toujours s’autoriser à parler ou à nommer les choses.
Jusqu’au 26 à 10h45 Salle Mistral. Rendez-vous devant le 11. Spectacle : 55 minutes + 10 minutes de trajet.
Visuel : par Artem Maltsev