
AVIGNON OFF 2022 : « Le jour où mon père m’a tué », j’étais seul, comme un con…
Le jour où mon père m’a tué est une tragédie familiale, perdue au milieu de milliers de faits divers… Elle aurait pu tomber dans l’oubli si la compagnie Macha Productions ne s’en était pas emparée. Sur scène, à la Chapelle du Verbe incarné et pendant tout le festival OFF d’Avignon, elle vous invite à revivre les derniers moments d’un jeune homme qui voulait simplement nouer une relation avec son père…
Le jour où mon père m’a tué est une pièce inspirée d’une histoire vraie et bouleversante, qui a eu lieu il y a quelques années en Guadeloupe, celle d’un père qui a abattu d’une balle dans l’abdomen son fils de 18 ans…
Un simple fait divers pour de nombreuses personnes, mais pas pour tout le monde. Choquées par ce drame familial, ainsi que par la manière dont les médias et la population le traitèrent, Charlotte Boimare et Magali Solignat ont décidé d’en écrire une tragédie.
Le jour où mon père m’a tué est l’histoire de Roméo, alias Black Bird. À l’aube de ses 18 ans, il décide de quitter la métropole pour rejoindre son père en Guadeloupe, ce père qu’il n’a jamais connu, ce père qui n’a jamais voulu de lui, ce père, avec qui il a pourtant envie de nouer une relation…
Mais les choses ne se passent pas toujours comme prévu. Et une fois sur place, loin de sa mère, loin de sa copine, loin de son meilleur ami, avec lesquels il tente, malgré tout, de rester en contact via Facebook, Black Bird est seul comme un con, face à un père qui l’ignore royalement, plus préoccupé par sa célébrité, par son image irrévérencieuse d’animateur radio de nuit… La désillusion est cruelle. Béranger n’en a strictement rien à faire de son rejeton. Ce n’est, pour lui, qu’un poids mort qu’il a désormais sur les bras, un danger ambulant qui pourrait à tout moment faire voler en éclat la réputation qu’il a mis tant d’années à construire…
Face à tant de cynisme et d’indifférence, Black Bird, qui venait simplement quérir l’amour paternel, a de plus en plus de mal à respirer dans ce monde superficiel, empli d’hypocrites, où la vérité n’a pas sa place et où il est privé de ses repères. Le constat est amer et Black Bird enrage. Il est perdu dans un endroit qui lui est totalement étranger et dont il n’a pas les codes. Il est gonflé de tristesse et pétri de haine. Et quand sa colère finit par exploser, personne ne tente de le calmer, personne ne tente de le consoler… il est abattu et mort seul, comme un con…
Dès le début de la pièce, nous connaissons la fin tragique du voyage de Roméo. Il n’y a qu’à regarder la une des journaux accrochés aux pupitres. Nous revivons, sous forme de flash-back, ses derniers moments, véritable descente aux enfers, de son arrivée en Guadeloupe jusqu’au jour où son père l’a tué.
Nous revivons son histoire sous forme d’un feuilleton radiophonique. Sur scène, on retrouve le micro et la perche pour le son… du matériel de pro… ce même matériel que Béranger utilisait pour ses émissions, dont les quelques extraits suffisent à nous dresser un portrait peu flatteur du personnage, ce même matériel qui sert aujourd’hui à retracer la mort de son fils…
Une tragédie dont les médias et la population s’emparèrent avec un engouement quelque peu gênant… Recherche désespérée d’un moment de gloire, aussi fugace soit-il, et autres motifs viennent interrompre violemment le récit de Black Bird. Des interruptions hors-sol et dérangeantes qui contrastent avec la tragédie vécue par Black Bird…
Émotionnellement, ce sont les montagnes russes. Nous sommes happés par l’histoire de Black Bird et sidéré par les réactions qu’elle suscite, au point de nous demander si tout ceci est bien réel, si tant d’indifférence, de cynisme et d’égoïsme sont possibles. Jusqu’où sommes-nous prêts à aller pour faire le buzz ? Jusqu’où sommes-nous prêts à aller pour jouir d’un bonheur qui n’existe peut-être pas ?…
Dans la pièce, les témoignages se succèdent, comme dans un tribunal populaire et, sous leurs airs innocents, nous glacent le sang car l’histoire de Roméo, alias Black Bird, n’est pas qu’un drame familial… Elle est aussi la conséquence d’une société malade, qui a perdu ses repères et où plus rien n’a vraiment d’importance.
Le jour où mon père m’a tué, un drame écrit par Charlotte Boimare et Magali Solignat, mis en scène par Magali Solignat, interprété par Alain Guillo, Tom Almodar, Charlotte Boimare et Magali Solignat, produit par la compagnie Macha Productions, présenté du 7 au 30 juillet 2022, à 13 h 35, à la Chapelle du Verbe incarné, salle Édouard Glissant, pendant le festival OFF d’Avignon. Relâche les 13, 20 et 27 juillet 2022. Durée : 1 h 15.
Découvrez la programmation de la Chapelle du Verbe incarné dans le cadre du festival OFF d’Avignon 2022 (ici).
Retrouvez, ici, tous les articles de la Rédaction de Toute la Culture dans un dossier spécial festival d’Avignon.
Visuels : Affiche et photos tous droits réservés respectivement à Big et Batsh et à Barbara Buchmann.