Performance
Imitationofdeath, une perf fracassante mais excessivement démonstrative

Imitationofdeath, une perf fracassante mais excessivement démonstrative

19 November 2013 | PAR Christophe Candoni

À la MC93, seize acteurs-danseurs livrent une performance physique et crue autour des fragilités humaines. Ils brisent les tabous et mènent un combat tapageur contre les heurts et maux de la société contemporaine. Corps surexposés, nudité intégrale et frontale, urgence, violence, fureur, souffrance font les ingrédients chocs du spectacle signé Stefano Ricci et Gianni Forte, dont la compagnie bouscule le théâtre italien depuis le début des années 2000. Ils ont des choses à dire sur le monde d’aujourd’hui, mais leur propos se noie dans le bruit et l’agitation d’un fatras d’effets faciles et esthétisants.

L’espace scénique est balisé d’une banderole de chantier. Des corps couchés au sol sont pris de convulsions et tentent de s’élever, de grandir, puis de retrouver la pesanteur, perchés sur des talons compensés avec du gros scotch, pour s’exposer massivement et s’accoupler dans une dynamique à la fois d’attraction et de rejet, de domination et d’humiliation, d’érotisme brutal.

Stimulée par une formidable playlist  (Muse, the Chemical Brothers, Pink Floyd), la performance ne manque pas de rage et de sursauts. Son langage très physique alterne jeu et danse. Il y a de beaux moments, comme lorsque les membres du groupe portent l’un d’entre eux comme une victime-martyre à la manière d’un Christ très pictural. En revanche, son caractère profondément adolescent et immature exaspère et ces jeunes gens surprennent par leur nostalgie d’un théâtre provocant et activiste plus désuet qu’innovant. Ils ont de l’aplomb, un certain courage, des idées et des convictions, une énergie, une sincérité, une témérité stupéfiante, encore que leur épuisement soit totalement feint malgré l’effort et l’investissement réels, mais leur geste, comme leur vision, est souvent simpliste et illustratif. Il manque de force et de profondeur.

Le texte parle, sans véritables problématisations, d’une société morose et agressive, de sexe, du besoin d’amour et de la difficulté à dire à l’autre qu’il est aimé, du sentiment de non-appartenance à un groupe, d’intolérance à la différence, d’hyperconnexion et des réseaux sociaux. Il traduit une profonde angoisse et une absence de repères mais en nous gratifiant d’aphorismes vaseux comme « oublier la douleur est difficile, oublier la douceur l’est plus encore » ou « l’absence de vie permet d’exprimer la vie ». On est loin de l’écriture affûtée d’un Falk Richter par exemple, dont l’œuvre est traversée des mêmes thèmes ô combien contemporains et concernants.

Imitationofdeath peut être séduisant, assurément accrocheur bien qu’un poil artificiel, finalement peu cinglant et surtout peu libérateur dans la mesure où aucune solution réparatrice n’est apportée aux problèmes pointés. Ces hommes et ces femmes sont condamnés dans la dernière scène à la destruction d’objets chéris de leur enfance (anciennes VHS, bandes dessinées, peluches, vêtements…) et donc d’une part d’eux-mêmes. Exutoire ou défaitisme ? On y voit un adieu, peut-être à la vie puisque la mort a été annoncée au début du spectacle, et surtout pas une promesse d’avenir meilleur.

Photos © Gianfranco Fortuna / à 20h30, le mardi à 19h30, le dimanche à 15h30. Relâche les 18, 21, 25, 28 novembre. Durée : 1h15.

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