
Une Hérodiade de Massenet somptueuse à l’Opéra de Marseille
Cela faisait plus de 50 ans qu’Hérodiade de Massenet (1881) n’avait pas été créée à Marseille. Avec Victorien Vanoosten à la direction et parmi les solistes : Florian Laconi, Inva Mula et Béatrice Uria-Monzon, on a pu goûter pleinement la musique magnifique de cet opéra trop peu donné.
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Inspiré par la nouvelle de Flaubert, Hérodias, le compositeur de Thaïs rédime le personnage de Salomé avec l’aide des librettistes Paul Millet et Henri Gremint. En 1881, Wilde n’a pas encore inventé la danse des sept voiles et Hérodiade fait de Salomé une pure amoureuse disciple de Jean et fervente croyante, au point de lui enlever son attribut depuis l’Evangile : le Plateau. Et une fille reniée par sa mère. Jour d’horreur que le suicide de cette héroïne d’opéra très classique sur fond de révolte impossible des juifs contre les romains.
C’est dans un décor sobre mais menaçant (des javelots empilés) avec, à temps, un sensuel écran de fond de scène que Jean-Louis Pichon, metteur en scène très familier de l’univers de Massenet, nous propose une Hérodiade élegante et mordorée où les costumes de Jérôme Bourdin flamboient comme le rêve d’une Jérusalem Délivrée. Et dès les premières notes, c’est un enchantement musical qui ne cessera pas pendant trois heures, sous la baguette vive de Victorien Vanoosten. L’ouverture, les interludes nous tiennent en tension.
En reine amoureuse, Béatrice Uria-Monzon est une méchante puissante et émouvante. Dans le rôle de Jean, Florian Laconi est acclamé tant il est un prophète précis et puissant, sa voix fait trembler les murs de l’opéra et c’est un enchantement. En Herode Jean-Francois Lapointe monte en vigueur et nous séduit avec le lascif air « Vision fugitive » du deuxième acte. Parfaite vocalement mais peut être un soupçon moins charismatique que les autres solistes, Inva Mula est une Salomé belle et docile.
On sort de l’opéra en tremblant, curieux de savoir pourquoi on n’entend pas plus souvent cette magnifique musique que le chef d’orchestre place habilement entre Wagner et Puccini. Peut être à cause du livret suranné? Ou du français si difficile à prononcer ? Il ne demeure pas moins que la musique vaut le voyage jusqu’au 30 mars à l’Opéra de Marseille et plus tard à l’Opéra de Saint-Etienne.
Visuels: (c) Christian DRESSE / Opéra de Marseille