Danse
« Trottoir », les totems en mouvement de Volmir Cordeiro

« Trottoir », les totems en mouvement de Volmir Cordeiro

10 December 2019 | PAR Amelie Blaustein Niddam

Au Festival d’Automne et au CND le danseur et chorégraphe brésilien signe une pièce de groupe tenue et radicale où les violences de la rue avancent en rythme.

Venir à Pantin par ces temps est un acte. Cela rappelle qu’aller voir un spectacle devrait toujours être un acte. Grâce à la grève, il faut penser et tordre ses chemins. Prendre du temps, beaucoup, marcher, beaucoup. Et finalement cela fonctionne encore mieux que d’habitude. Le public qui a réussi à joindre le CND est en pleine conscience. Personne n’est là par hasard. La salle et pleine, la liste d’attente reste insatisfaite, l’attention est différente de d’habitude.

Hasard du calendrier sans doute, cette création se teinte dans le contexte social d’une rage particulièrement violente. Trottoir est le pendant de Rue, son duo avec le danseur et percussionniste Washington Timbó (2015) également au plateau ici.

Alors, Volmir Cordeiro, Martin Gil, Isabela Fernandes Santana, Marcela Santander Corvalán, Anne Sanogo et Washington Timbó avancent masqués. Leurs visages sont recouverts de collants colorés et leurs corps le sont tout autant. Les couleurs sont criardes, absolument pop, limite fluo. Rien ne va avec rien, c’est un chaos visuel. Cela ne s’arrête pas là. Ils ont tous les mains gantées, dans une autre cacophonie. Des gants de cuisine ou de travail habillent les mains. Aux pieds des grosses pompes et sur la tête des casques qui eux assignent des fonctions : le flic, le militaire, le cavalier, la touriste…

Dans une mise en route et un décor (vous verrez, le sol n’est pas vraiment un tapis de danse !) qui assument emprunter au théâtre l’idée de saynètes, le collectif mime un geste avant de se figer. Ce qui est drôle dans le mouvement devient enragé en étant fixe. Ces sculptures, dont l’apogée sera cette traversée d’une danseuse la tête chevauchée de tous les chapeaux, deviennent des totems pour nous protéger. Nous sommes ici guidés par la voix de Anne Sanogo qui slame et chante les armes de nos combats.

La danse explose dans un geste qui pourrait être celui d’une liesse urbaine. Trottoir semble vouloir apprivoiser la rue, qu’on imagine brésilienne où l’horreur surgit en une seconde. Ici le sexe, la baston, le rire, la course, la joie s’articulent sans transition. L’énergie folle des danseurs à la fois laxe et saccadée est autant un cri contre les interdits q’une explosion de liberté.

Visuel : Volmir Cordeiro © Arthur Crestani

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Bastien Stisi
Journaliste musique. Contact : [email protected] / www.twitter.com/BastienStisi

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