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KOZHETTE, un spectacle de cirque très théâtralisé

KOZHETTE, un spectacle de cirque très théâtralisé

12 January 2017 | PAR Mathieu Dochtermann

Le spectacle Khozette a posé ses valises pour 10 jours au Cirque Electrique. Première expérimentation d’une jeune compagnie, il se distingue par son inventivité: agrès unique et inconnu à ce jour, scénographie très soignée, loufoquerie revendiquée jusqu’à flirter avec l’absurde… ce n’est pas un spectacle de cirque ordinaire! S’il souffre de quelques longueurs et laisse un goût de pas-tout-à-fait-achevé, il vaut le détour pour son originalité.

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KOZHETTE constitue le premier spectacle très prometteur d’une jolie bande de trois rigolos, qui présentent là une oeuvre très écrite, qui tient finalement plus du théâtre que du cirque.

Du point de vue circassien, sur les trois compères, un seul se livre en effet à des acrobaties. Pour autant, elles valent le détour, car Benoît Fauchier utilise un agrès qu’il a mis au point lui-même, et qu’il est le seul à pratiquer: la Spirale. Inspirée d’une Roue Cyr, mais intégrant deux angles et une barre droite qui forme l’axe de la spirale, c’est un instrument au maniement complexe, qui permet aussi bien certaines des évolutions de la Roue Cyr que des figures qui lui sont propres, avec beaucoup d’à-coups et des trajectoires cassées. Un agrès exigeant et physique, qui met le circassien en difficulté et souligne la fragilité de son art. Nouveau et intéressant, en tous cas, et la dramaturgie du spectacle en tire tout le potentiel dans sa dimension précaire, bricolée, dysfonctionnelle.

Car dramaturgie il y a clairement, puisque le spectacle est finalement moins de cirque que de comédie. En effet, les deux acolytes de Benoït Fauchier sont respectivement musicien et éclairagiste, et ces deux techniciens jouent donc à ces côtés, en théâtralisant leur fonction. Par le contrôle qu’ils exercent sur l’environnement du spectacle, ils en prennent en réalité les commandes, dans une sorte de dictature absurde et cruelle qui s’exercerait sur le circassien qui évolue sur la piste. C’est une courte fable sur les rapports de domination et sur l’absurdité de la condition de l’homme exploité qui nous est donnée à voir, et il faut admettre que l’écriture est exigeante, et que cette dystopie circassienne évoque avec une certaine finesse certains des (gros) travers de notre société. Le spectacle n’a cependant rien d’un sermon ni d’un exposé sentencieux, puisqu’il explore la veine de l’absurde et du clown cruel. Cependant, on se prend à regretter qu’il n’aille pas plus loin dans cette direction, et le flirt avec l’imagination la plus délirante n’ira jamais jusqu’à une complète consommation… C’est dommage!

Le tout s’inscrit dans une scénographie très soignée, où les deux techniciens sont perchés sur le petites plateformes en surplomb de la piste, accrochées à des mâts installés sur son pourtour. L’accompagnement musical, décrit comme “électro-rock-mustette”, est éclectique et réjouissant. La mise en lumière fait du coup partie très intégrante du spectacle, puisque l’acte même de mettre en lumière est valorisé, ce qui est plutôt rare dans le spectacle vivant.

En somme, un spectacle jeune, mais riche de potentiel en rire, en grâce et en intelligence. Le Kozh Productions sera sous le chapiteau de la Porte des Lilas du 11 au 22 janvier 2017.

 

Spirale : Benoît Fauchier
Musique : Yann Provost
Lumières : Ronan Bernard
Regards extérieurs : Daniel Gulko et Céline Valette

Visuels: (C) Kozh Productions

 

Infos pratiques

La Scène Watteau
Musée d’Orsay
cirque electrique

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