![[Live report] Paléomusique, l’étrange chant des pierres préhistoriques, un voyage sensoriel exceptionnel](https://toutelaculture.com/wp-content/uploads/2014/03/P1050584ok-1024x576.jpg)
[Live report] Paléomusique, l’étrange chant des pierres préhistoriques, un voyage sensoriel exceptionnel
L’amphithéâtre du muséum d’histoire naturelle accueillait ce week-end un évènement unique, historique, fascinant et indubitablement excitant ! « Paléomusique » où Hanaé et les pierres musicales, un conte musical nous permettant de voir et d’entendre retentir de mystérieuses pierres nommées Litophones datant du Néolithique, soit de 8000 à 2500 ans avant J-C. Dans le cadre des 80 ans de l’Orchestre national de France et de l’opération « Musicomusées », quatre percussionnistes eurent ainsi le privilège de faire tinter pour la première fois depuis 10000 ans ces pierres, comme nos ancêtres les plus lointains !
Arrivés une heure avant le début de la représentation, l’on pouvait déjà constater l’imposante file d’attente aux portes de l’amphithéâtre du muséum. Une foule de curieux, adultes, enfants, de passionnés de musique comme d’histoire, d’archéologie, venus participer à une aventure musicale, faire un bond en arrière, un voyage au travers du temps, à la recherche de la musique de nos ancêtres. Une foule de curieux venus entendre résonner d’étranges pierres, longues, polies, plates ou cylindriques. Découvertes dans la région du Sahara pour la plupart au début du XXe siècle, ce n’est qu’en 2004 que l’on découvre les talents musicaux de ces pierres jusqu’alors injustement rangés sous le nom de « pilon saharien », ou « hache ».
Pour l’occasion, le paléomusicologue Erik Gonthier, la responsable pédagogique de l’orchestre national de France Marie Faucher, et le compositeur Philippe Fénélon ont uni leurs talents et créé Paléomusique. Le conte musical narre l’histoire d’Hanaé, de sa rêverie l’emportant au cœur du Sahara ou par hasard elle trouvera une curieuse pierre, qu’elle va faire sonner tapant dessus avec les baguettes de son chignon. Porté par la voix de la comédienne Adele Jayle, il présentait ainsi de manière ludique l’origine et le fonctionnement de ces pierres magiques qu’il nous tardait d’entendre sonner. Projet pédagogique sous toutes ses formes, il était accompagné d’un film d’animation créé par des étudiants en animation visuelle, de l’école Estienne.
Disposés sur une table au centre de la pièce autour de laquelle est déployé un attirail de percussions en tous genres, les 22 litophones demeurent cachés d’un linge blanc – titillant d’autant plus encore notre curiosité – jusqu’à ce que la petite fille de notre histoire ne découvre sa pierre. Quel son une pierre peut-elle bien émettre ? On imagine un « POC » sec, ferme, robuste et sans résonnance mais il n’en est rien. Le son a quelque chose de métallique et se situe entre celui d’un vibraphone et d’un xylophone, en toutefois plus clair, plus pur, plus franc, plus distinct.
Au rythme du récit, le dispositif sonore nous plonge dans l’aventure d’Hanae, nous permettant d’entendre le souffle du vent, le glissement du sable, le scintillement des étoiles, puis enfin, les pierres musicales. A la découverte de la pierre magique, Hanae se sent irrémédiablement embarquée dans une transe frénétique, festive et créative. La partition devient alors plus rythmée, prenant des allures de célébrations tribales, s’anime et s’illumine du carillon minéral joué ici à 4 mains. De l’émerveillement, de la joie de la petite fille à la découverte de ces sons et de ses sens en plein milieu du désert, nait l’émerveillement du spectateur dont l’âme vagabonde voit enfin sa curiosité rassasiée. Malheureusement l’envoûtement de ces sons d’antan sera interrompu par un glissement de terrain monumental, qui voit reprendre le ballet des accessoires projetant la petite fille au fin fond d’une caverne aux parois recouvertes de stalactites et stalagmites. Ainsi, après un moment de folie musicale, l’aventure redémarre, Hanae explore, distingue des sons dont elle cherche à se rapprocher. Puis, là sous ses yeux se crée l’Histoire, celle qu’elle appréhendait à l’école, celle qu’elle était venue découvrir en compagnie de son papa et de son petit frère au musée, celle des premières pratiques artistiques, la naissance des peintures rupestres mais surtout la musique. Le chant de la roche reprend, mené tambour battant par ces hommes de la nuit des temps, qui apercevant la petite fille l’inviteront à la rejoindre.
Ainsi l’on se délecte une dernière fois d’entendre tintinnabuler le clavier rocailleux, toujours dans cet esprit de réjouissances. Alors qu’Hanae se réveille de ses songes, le public s’éveille également, conscient d’avoir eu la chance de vivre tout comme la protagoniste de notre histoire une expérience unique. En effet, les pierres, trop fragiles ne résonneront désormais plus, conférant ainsi un caractère exceptionnel aux trois concerts du week-end et le sentiment du privilège à l’auditeur. Une découverte grisante, sublimée par ce joli conte qui nous permit en plus d’entendre ces instruments, de nous émerveiller, de rêver, de partir loin de Paris, en plein désert, en plein cœur de l’histoire.
Visuels: © DR