
Les sœurs Labeque et l’orchestre du Concertgebouw d’Amsterdam, une soirée unique à la Philharmonie de Paris
Pour leur unique concert à Paris, nous étions lundi soir de retour à la Philharmonie de Paris pour écouter les sœurs Labeque et l’orchestre du Concertgebouw d’Amsterdam.
Max Bruch. Concerto pour deux pianos.
Cette œuvre peu jouée, fut longtemps perdue et oubliée.
Datant de 1912, Elle montre à quel point Bruch est toujours resté ancré dans un classicisme romantique, loin des évolutions tonales du début du XXe siècle.
Apres une poétique introduction sous forme de choral fugué à quatre mains, les deux pianos font presque partie intégrante de l’orchestre, tel deux harpes arpégeant devant un orchestre compact et suave à souhait que Semyon Bychkov malaxe de ces grandes mains avec délicatesse.
Les sœurs Labeque étaient magnifiques de puissance et de phrasés, laissant les solistes de l’orchestre s’exprimer quand il le fallait, et imposant la rigueur rythmique du mouvement final avec verve. Le romantisme et le talent de mélodiste de Bruch ne pouvait être mieux servi.
Le Jet Song de Bernstein, dans un arrangement très swing pour deux pianos fit Le bonheur de l’auditoire.
Shostakovich. Symphonie no5
À l’inverse du concerto de Bruch, cette symphonie de Shostakovich demeure aujourd’hui l’une des œuvres les plus jouées et Les plus populaires du compositeur.
Des l’attaque puissante des pupitres de violoncelles et contrebasses, on sait que cette interprétation de la titanesque et contrastée symphonie no5 de Shostakovich sera exceptionnelle.
Bychkov est habité par cette musique de bout en bout. Le largo central fut une suspension du temps, de l’espace comme seul Les grands orchestres et Les meilleurs chefs savent Le faire.
Les cordes du Concertgebouw sont capables de nuances inouïes, de l’arraché au pianissimo le plus imperceptible.
Que dire des nombreux soli de bois (flûte et basson en tête) où les chefs de pupitre ont sidérés le public.
Jamais nous n’avions vu un timbalier autant acclamé, quand Bychkov fit lever un à un tous les pupitres de l’orchestre, jusqu’à traverser entièrement la salle pour aller saluer personnellement les contrebasses au fond du plateau.
Bychkov est un ogre magicien, a qui rien n’échappe, et qui semble possédé en lui cette évidence musicale qui appartient aux plus grands.
L’orchestre du Concertgebouw d’Amsterdam a lui prouvé encore une fois ce soir qu’il mérite bien son titre de meilleur orchestre européen.
Le public ne s’y trompa pas et lui fit une ovation méritée qui poussa les musiciens à conclure avec un émotionnel “encore”: Nimrod d’Edward Elgar.
Une soiree exceptionnelle qui laissa le public de la Philharmonie étourdi.
Vladimir
Visuel : Marielle & Katia Labèque © Umberto Nicolett