
Le don empoisonné de la folie : les confessions de Lucia Etxebarria en français
Lucía Etxebarría, écrivaine espagnole, publie aux Editions Mazarine un livre exclusif pour son public français, Le don empoisonné de la folie. D’une plume fine, intime et émouvante, la romancière et journaliste féministe se confie comme elle ne l’a jamais fait dans une langue qui n’est pas la sienne et avec une sincérité désarmante.
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Une plongée dans l’intimité
Qu’est ce qui a poussé Lucía Etxebarría, romancière très populaire en Espagne, à écrire un nouveau livre en français et qui ne verra jamais le jour dans son pays natal ? Ecrire dans une langue étrangère est un exercice compliqué, désarmant pour une personne aussi douée de ses mots que Lucía Etxebarría. On perd ses repères, le tissage n’est plus aussi naturel ni évident. Seulement, voilà.
En parcourant les quelques 300 pages que composent Le don empoisonné de la folie, la raison dévient évidente : écrire tient ici de la nécessité, de la thérapie. L’écrivaine espagnole, connue notamment pour son tout premier roman, Amour, Prozac et autres curiosités, nous plonge dans son intimité parfois avec brutalité, ne mâche pas ses mots –mais, en réalité, elle ne l’a jamais fait, dans aucun de ses écrits et aussi différents fussent-ils -, ne dissimule rien, n’arrondit pas les angles. La vérité est plaquée sur les pages. La vérité vraie, pas romancée, pas remaniée. Et c’est cette vérité justement qu’elle refuse de voir publier en Espagne :
« Dans mon pays, trop de gens me connaissent. Je ne peux pas m’enivrer ou embrasser en public, parce qu’il y a toujours quelqu’un pour prendre des photos. Je dois faire attention, me méfier des inconnus. Dans mon pays, on paie pour voir l’intimité des autres, et on a déjà essayé de vendre la mienne. Dans mon pays habitent ma famille, Mon Ex-Mari, le Père de ma fille. Dans mon pays vivent toutes ces personnes dont je crains le jugement ».
L’écrit thérapie
Lucía Etxebarría l’avait déjà montré dans un essai précédent publié en France en 2015, Ton cœur perd la tête. Elle a vécu récemment une relation passionnée, passionnelle, destructrice. Cette fois-ci, elle revient sur les années qui ont suivi cette relation. Trois ans de questionnements, de relations parfois vides, parfois encore trop intenses. Et des souffrances.
Avec une sincérité désarmante, Lucía Etxebarría fait de ses lecteurs français ses confidents, les confidents impuissants d’une femme souvent malheureuse, à l’intelligence brillante, à l’émotion d’une finesse fragile. Diagnostiquée zèbre à l’âge de 48 ans (elle possède ainsi un QI supérieur à 140), la romancière explique ses angoisses, ses peurs, ses sentiments. Elle les analyse, évoque ses parents, sa fille et ses amants. Elle ne cache rien sans pour autant, à aucun moment, ne pratiquer le moindre misérabilisme. Ce sont simplement les mots réels et les émotions à vif d’une femme comme une autre, populaire malgré elle mais à la sensibilité et humanité évidentes.
Lucía Etxebarría, Le don empoisonné de la folie, Editions Mazarine, 18€, 317 pages.
Visuel : © DR