![[Cannes 2021, Un certain regard] Rehana Maryam Noor, sombre portrait de femme avec du style](https://toutelaculture.com/wp-content/uploads/2021/07/rehana-maryam-noor-cannes-2021-toute-la-culture-un-certain-regard-977x405.jpg)
[Cannes 2021, Un certain regard] Rehana Maryam Noor, sombre portrait de femme avec du style
Originaire du Bangladesh, ce drame social très intimiste marque par ses partis pris, au sein desquels son actrice principale s’inscrit parfaitement.
L’héroïne de Rehana Maryam Noor est une femme qui se débat avec sa condition dans le Bangladesh actuel. Particulièrement forte tête, cette professeure exerçant dans un hôpital dissimule sa force sous un air buté et un visage sombre. Elle reste aussi inflexible quant aux questions de justice : soupçonnant une élève de tricherie lors d’un examen, elle la fait sortir sans pourparlers possibles ; voyant sa fille, qu’elle élève avec très peu d’argent, être conspuée dans son école après qu’elle ait mordu un camarade qui la pinçait sans cesse, elle fait tout pour la défendre ; et lorsqu’elle découvre qu’un professeur au-dessus d’elle dans la hiérarchie de l’hôpital a violé l’une de ses jeunes étudiantes, elle s’emploie à le dénoncer à tout prix.
Les luttes de cette héroïne dans une société patriarcale et marquée par les inégalités sociales sont vouées à l’échec : tous lui suggèrent de se taire, de rester calme sans faire de vague. Mais elle se bat tout de même. L’originalité de la réalisation d’Abdullah Mohammad Saad est d’apparaître engagée sans absolument aucun effet emphatique. La totalité du film baigne dans une photo gris argenté, réaliste et suggestive à la fois. Cet effet n’est pas lassant, au contraire : le visage buté et l’expression à toute épreuve de l’actrice Azmeri Haque Badhon s’inscrivent fort bien dans ce cadre, qui les met en valeur.
Autre originalité : le film se déroule quasi intégralement dans des couloirs ou des bureaux administratifs. La réalisation part d’éléments réalistes, les transforme en partis pris, et rend ces derniers tenus, jusqu’au bout : tout ceci devient donc signifiant, et procure au spectateur l’impression d’être plongé dans un pays où toute démarche, toute action, reste délicate à effectuer, potentiellement pleine de dangers pour celui ou celle qui s’y risque, ou encore sujette à des négociations sans fin. On reste en tout cas curieux de revoir sur un grand écran le réalisateur Abdullah Mohammad Saad exercer à nouveau ses singuliers talents.
Rehena Maryam Noor est présenté au Festival de Cannes 2021, au sein de la section Un certain regard.
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Visuel : © Potocol and Metro Video