
Variations cinétiques ; Nicolas Panayotou à la Galerie A2Z
Dans les années 1990 on se demandait ce qu’il restait de Marcel Duchamp, celui-ci étant alors un peu passé de mode et les pousses de son travail, dont l’art cinétique, connaissaient elles-mêmes une mauvaise passe. Aujourd’hui, de même que Duchamp est redevenu incontournable, l’art cinétique connaît une seconde vie. Habitué de la Galerie Popy Arvani [nos critiques ici] et de la Galerie Volchkova notamment, Nicolas Panayotou fait partie de ceux qui renouvellent cette veine depuis les années 2000 particulièrement, cette fois à la Galerie AZZ Art Galerie, autre de ses lieux de prédilection.
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Rhodon = rose
Rhodon signifie rose en grec antique. La couleur fut bien peu utilisée par les tenants de l’art cinétique, technique par laquelle le regard est trompé par la disposition – composition de la peinture. En effet on peut croire, à se déplacer autour de la quinzaine de pièces exposées de la série, à des mouvements internes à chaque œuvre ou à des effets de relief. C’est le propre du cinétique. Le peintre l’utilise depuis plusieurs années moins par la pluralité des matériaux utilisés que par le mélange des formes géométriques, comme Vasarely ou Soto, abondamment cités par son œuvre. Les superpositions, pochoirs anguleux sur formes circulaires sont la base du travail. La suite est composée de jeux de couleurs où, pour l’occasion donc, le rose est à l’honneur. A chaque pièce, cette déclinaison – juxtaposition laisse penser qu’une infinité de possibilités s’offre au spectateur comme à l’artiste tant il peut jouer sur tel ou tel effet.
On remarquera l’accord particulièrement réussi entre une galerie dont les plusieurs étages sont autant de volumes où les œuvres peuvent être bien identifiées les unes des autres, une série de pièces donc à la grande cohérence et un accrochage qui tisse et donc renforce ces liens entre les différentes pièces au fil des étages. L’effet de sérialisation est donc d’autant plus réussi. De même, cela renforce la « dimension participatoire » que F. Popper attribuait à cette forme d’art.
Autre question qu’on aimerait poser [à venir sur le site, l’interview de l’artiste par Yaël Hirsch] au peintre : le mouvement que cherche Nicolas est systématiquement suscité à l’intérieur d’une forme encadrante, englobante, une sphère le plus souvent. Pourquoi l’infini de ces mouvements est-il comme engoncé dans cette « boîte » tandis que Vasarely ou d’autres souhaitaient sortir de cette dernière ? Cette thématique de l’infini revient d’ailleurs sans cesse dans les expositions de la Galerie Popy Arvani où il prévoit de revenir très bientôt. Qu’y prépare-t-il ? De même, la recherche du volume peut-elle passer plus souvent par le relief et ses nouvelles techniques ou faut-il continuer à privilégier, comme un « classique » du genre, l’acrylique et la toile ?
Explorations de l’abstraction géométrique
A côté de la série qui donne son nom à l’exposition, quelques autres pièces sont présentées et dénotent particulièrement lorsqu’on connaît le travail de l’artiste. « CYCLADES » fait ainsi référence à Delaunay et, on ne peut s’en empêcher d’y penser à première vue, au Palais de l’Air de l’Exposition de 1937. Pourtant, cette abstraction géométrique inclut bien une forme de mouvement par sa chromatique particulièrement, les masses s’interpénétrant par transmissions de couleurs. On sait que le peintre produit aussi bien en France qu’à Athènes, qu’il a des attaches dans les Cyclades ; elles lui impriment visiblement des couleurs et masses chaudes pourtant rigoureusement ordonnancées, presque cadastrales. Autre œuvre dénotant, rappelant ici Le Parc : une installation située au sous-sol de la galerie. Des formes coniques s’entrechoquent par effet de projections : les cônes tournent sur eux-mêmes, les motifs géométriques se meuvent tel un drapé (un péplos ?) imprimé. Le rythme est lent et régulier, assuré. Enfin, une dernière pièce se distingue de la série principale : « BEAUBOURG » ressemble au site par les tubes s’y croisant dans un joyeux désordre rappelant une sérigraphie ou Tinguely, enfin les années 1960 par le choix de couleurs, le rose n’y étant pas absent, rappel au reste de l’exposition. Ces quelques touches, si elles reprennent les mêmes techniques, ouvrent l’espace de jeu des regards que Nicolas Panayotou sur le réel.
L’exposition – vente est disponible jusqu’au 5 juillet prochain avant une probable prochaine tournée à la Galerie Popy Arvani.
Visuel 1 – N. Panayotou – Rhódon II – Acrylique sur toile – 92 x 92 cm – 2015
Visuel 2 – N. Panayotou – CYCLADES – acrylique sur panneau – 130 x 97 cm – 2014
Visuel 3 – Nicolas Panayotou – BEAUBOURG hommage à Jean Dewasne – Acrylique sur panneau – 113 x 97 cm – 2013
Galerie A2Z Art Galerie
Jusqu’au 5 juillet
Paris 6
24, rue de l’échaudé 7006 Paris
Métro : Mabillon
Tel: + 33 (0) 1 56 24 88 88
www.a2z-art.com / [email protected]
Ouvert : 11h – 19h
TARIFS :
Gratuit