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Session de prérentrée au Petit Palais

Session de prérentrée au Petit Palais

03 October 2014 | PAR Franck Jacquet

A quelques jours de l’ouverture événement de l’exposition Baccarat qui constituera la vraie rentrée du Petit Palais, l’institution s’offre une « prérentrée » avec le nouvel accrochage d’une partie de ses collections permanentes. Ces dernières sont de plus mises en regard avec quelques chefs-d’œuvre du Musée des Beaux-Arts de Nantes, actuellement en travaux, et ce jusqu’au milieu du mois de janvier. L’occasion de redécouvrir une collection permanente riche et gratuite.

Toiles nantaises dans l’écrin temporaire du Petit Palais
Le MBA de Nantes étant en rénovation, le Petit Palais en a profité pour « inviter » une demi-douzaine de toiles majeures, essentiellement issues du XIXe siècle, pour « dialoguer » avec ses propres collections. Ce sont des toiles majeures : Polke, Ingres, Corot, Gérôme ou encore Delaroche et peut-être, moins connu, Horace Vernet. Les ajouts concernent cette section des peintures modernes et contemporaines, désormais recomposée.
Le prêt est incontestablement modeste par le nombre, mais il est compensé par le fait que les toiles sont confrontées aux propriétés de l’hôte. Ainsi James Tissot est en effet déjà bien présent par ses toiles historicistes dont « Le départ du fils prodigue », où le jeune bourgeois de la cité vénitienne part dans une débauche de luxe et de considérations, le tout dans un décor de la fin du Moyen Age magnifié, idéalisé et recouvert de bocards, de tissus précieux tels qu’on les imaginait dégoulinant des maisons au milieu du XIXe siècle. On mesure donc l’intérêt de la présence de la copie en grisaille du portrait qu’Ingres avait fait de Mme de Senonnes. Ce portrait singe complètement la représentation de la haute bourgeoisie et de la noblesse officielle d’alors. On peut ainsi comparer, à distance puisque l’accrochage a préféré rapprocher Ingres et Tissot plutôt que les Tissot dans une même pièce.
Ces ajouts passagers en provenance de Nantes font tout particulièrement sens dans le cadre d’une belle pièce où l’imaginaire romantique puis la fibre réaliste retracent une large part de l’art du XIXe siècle. On y trouve ainsi « La ballade de Lénore » d’Horace Vernet, représentant le romantisme du déchirement, le plus fantasque, là où l’on peut imaginer un cheval monté d’un squelette chevalier emmener fiévreusement une jeune princesse dans la pénombre d’un lieu désolé où les ruines et les tombeaux médiévaux invitent à l’inquiétude. En face, le paysage de la forêt, tout aussi sombre se fait plus contemplatif chez Corot qui y place les réflexions naturalistes d’un « Démocrite et les Abdéritains ». Gérôme par sa peinture édifiante et orientaliste ou encore Hamon avec « La tutelle » où une jeune femme à l’italienne, dans un paysage méditerranéen, le tout dans une mise en scène néo-grecque mais réaliste sont juxtaposés comme pour rappeler les passerelles mais aussi les césures essentielles de la peinture des deux derniers tiers du XIXe siècle.
L’ensemble reste donc modeste en termes de prêts, mais les associations sont appréciables.

Faire vivre les collections permanentes

L’essentiel pour le Petit Palais semble donc de remettre en lumière ses collections permanentes et de créer de l’attrait en dehors des grandes expositions temporaires dont les succès sont évidents (succès critique pour des sujets « pointus » comme « Les impressionnistes slovènes » ou succès populaire majeur pour « Paris 1900, ville spectacle »). Ces dernières saisons, ce sont elles qui ont dopé la billetterie. En effet, le Musée des Beaux-Arts qu’est cette institution éprouve des difficultés quant à la mise en avant d’œuvres aussi diverses que ses céramiques antiques (notamment grecques), sculptures religieuses de bois occidentales, icônes orthodoxes (magnifiques !)… L’angle choisi a été clairement d’attirer sur les toiles du XIXe siècle, celui auquel est le plus souvent associé le Palais et ce qui n’échappe pas aux mécènes qui s’intéressent de plus en plus à l’institution, plus accessible que sa grande voisine.
On ne manquera pas à ce titre de remarquer qu’une des salles les plus mises en valeur est une salle pour le moins « historiciste », où l’on a associé des chaises licornes en bois doré de François-Honoré-Georges Jacob des années 1820 avec un coffre gothique du XVe siècle et une toile historiciste et ouverture néo-gothique des années 1840. Rien n’a cependant été touché sur la salle d’immersion reconstituant une pièce entièrement meublée de style Art nouveau. Un remaniement aurait été nécessaire pour la sortir de son atmosphère de naphtaline… Les visiteurs la goûtent généralement peu alors qu’ils s’attardent si longtemps devant le mobilier Majorelle des Arts déco…
Que penser de cette restructuration partielle ? Elle a le mérite de montrer les efforts annuels de l’institution au-delà des expositions permanentes. Elle est aussi l’occasion de rappeler les dernières acquisitions, non négligeables depuis une dizaine d’années comme dans le reste des musées de la Ville de Paris. Elle a enfin pour fonction de rappeler la portée scientifique et de conservation du musée. Ainsi est présenté « Le festin de Balthazar », tableau de Claude Guy Hallé, restauré par Paris par le biais de sa mission de conservation et de restauration des œuvres issues des édifices religieux de la Ville. La redécouverte, la restauration et les nouveaux détails et explications de l’œuvre en une salle rappellent donc ce rôle de l’institution et complètent un nouvel accrochage et cette convocation d’œuvres nantaises parfois légers mais intéressants et fluides.

Visuel 1 : Jean-Baptiste-Camille Corot (Paris, 1796 – Paris,
1873) – Démocrite et les Abdéritains, 1841, Huile sur toile © RMN-Photographie : G. Blot © MBA de Nantes

Visuel 2 :
Sigmar Polke (Oels, 1941 – Cologne, 2010) – Sans titre – Techniques mixes sur toile © Ville de Nantes-Musée des Beaux-Arts – Photographie : C. Clos © The Estate of Sigmar Polke, Cologne / Adagp, Paris 2014

Infos pratiques

Musée national Fernand Léger de Biot
Musée d’Ethnographie de Bordeaux 2
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