Collection Marlene et Spencer Hays à Orsay : “une passion française”
Dans un élan philanthropique et amical, Marlene et Spencer Hays proposent au public français de venir découvrir les plus belles pièces de leur collection au musée d’Orsay. Il faut dire que leur collection, née dans les années 1970, fait la part belle aux post-impressionnistes français – Nabis, symbolistes, fauves.
Elégant dans son costume fine stripes, Spencer Hays se prêtait cet après-midi de bonne grâce aux questions de la presse, accompagné de son épouse Marlene. Leur collection est en effet née d’une passion commune, et représente un ensemble aussi cohérent que celle du Docteur Barnes à Philadelphie, ou la Frick Collection. Issus de familles modestes, sans connaissance du milieu de l’art, Marlene et Spencer sont de parfaits représentants de l’American Dream. Self made man, Spencer peut bientôt offrir à son épouse une maison à Nashville, puis un appartement à New York, qu’il va falloir décorer.
C’est ici que l’aventure de la collection commence, car les époux n’entendent pas suivre aveuglément les conseillers de Nashville, qui les portent vers l’art américain de la fin du XIXe siècle. Séjournant régulièrement dans la Ville lumière, ils montrent vite un intérêt pour les artistes français, découragés en revanche par les prix prohibitifs qu’atteignent les toiles des maîtres impressionnistes. Qu’à cela ne tienne, ils liront, accumuleront les connaissances et partiront à la rencontre des grands conservateurs de musée, pour découvrir les toiles mystérieuses produites par les Nabis et les symbolistes.
Les toiles de Bonnard, Vuillard, Redon, Maurice Denis ont en commun un sens du mystère et de l’intimité, qui les séduit, et leur permet de se rapprocher de leur goût pour la mode de l’époque, et les arts décoratifs français de la période. Amateurs de peinture, les Hays ont aussi un penchant pour le dessin (monsieur surtout), et sont bibliophiles. Deux photographies murales permettent de resituer les oeuvres dans leur contexte d’exposition. C’est bien simple, on se croirait dans un hôtel parisien ! De fait, leur demeure à Nashville est la reproduction a minima de l’hôtel de Noirmoutier, rue de Grenelle.
Si quelques salles sont plus académiques – l’ensemble de natures mortes de la section Vanités, par exemple -, la grande salle consacrée aux chefs-d’oeuvre symbolistes et Nabis est une pure merveille. Des toiles énigmatiques de Redon jouxtent un magnifique paravent au rouge lumineux de Bonnard, face à de superbes panneaux de Maurice Denis, imitant la tapisserie. Un peu plus loin, des meubles de Follot font écho aux toiles intimistes des nabis, portés sur les intérieurs bourgeois de la fin du siècle.
Une exposition qui permet de découvrir l’art de collectionner à l’américaine tout en savourant le temps de la visite des toiles de maîtres qui repartiront ensuite outre-Atlantique.
Crédits photographiques :
Intérieur de Marlene et Spencer Hays à Nashville (en une)© Photo John Schweikert
Le Printemps, imitation de tapisserie, 1894, Maurice Denis © ADAGP, Paris 2013
Paravent à trois feuilles – canard, héron et faisan, 1889, Pierre Bonnard © ADAGP, Paris 2013
Fleurs roses sur fond bleu, projet de textile, s.d., Raoul Dufy © Photo Pauline Shapiro © ADAGP, Paris 2013