
Avignon OFF : Philippe Caubère fait un saut au festival avec son BAC 68
Philippe Caubère semblait avoir dit au revoir à son public avec Adieu Ferdinand – Le Casino de Namur. En attendant la nouvelle page de la carrière d’un Caubère sans Ferdinand, l’acteur mythique d’Ariane Mnouchkine fait un saut au OFF avec son texte inaugural, vieux de 37 ans BAC 68. Son public est toujours au rendez vous.
Bac 68 est une comédie écrite, mise en scène et jouée par Philippe Caubère après avoir été improvisée devant Jean-Pierre Tailhade et Clémence Massart. De cette improvisation la pièce a gardé ce ton que seul Caubére sait jouer, un ton qui imite la confidence et la conversation avec le public
Mai 68, la révolte gronde. L’étoffe du monde des arts et de la pensée se déchire. Un nouveau monde émerge accompagné presque par inadvertance par le jeune Philippe Caubére à qui on rabâche le consacré “Passe ton bac d’abord”. Il ne veut être que comédien et l’histoire fabuleuse décidera que les événements de 68 lui donneront un Bac immérité mais bien réel. Sans bac il était promis à devenir coiffeur. Avec le Bac 68, il deviendra acteur. Et nous en sommes là, près de 40 ans plus tard à (nous) repasser avec lui les circonstances qui lui ont prodigué ce bac et la carrière unique qui s’en suivit.
On rit beaucoup. D’un rire clair lorsque sa mère, bourgeoise inculte et trop bavarde est prête à tous les stratagèmes pour que son fils obtienne son bac; lorsque la même mère, envahissante et écrasante, s’empresse de disqualifier ce bac obtenu par complaisance. On rit de sa voiture Dyane au système de vitres inénarrable et de son embardée dans les oliviers. On rit de ce professeur qui collectionne les papillons et dont les murs du bureau sont recouvert de milliers de papillons épinglés cependant qu’encore vivants. On rit tout au long car Caubére est un génie du jeu. Un génie qui nous fait croire à tout sans jamais nous laisser dupe.
La joie du théâtre apparaîtra dans l’après-coup à cette salle enthousiaste entre les fidèles de plus de 30 ans, les affidés et ceux qui découvrent Caubére en se demandant comment ils ont pu ignorer l’existence de celui qui est déjà mythique. Dans la salle quelques comédiens car Caubére à chaque fois et sans le dire tient classe. Il dissèque et détricote ce qu’est le théâtre. Chez Caubère, le texte auto-biographique, fil d’Ariane de tous ses spectacles et venant du hors champ prend une place particuliere. La construction de l’édifice tient par ce texte qui fait tiers car Caubère tient la place et du texte et de l’auteur et du personnage. Le comédien ne peut jouer au plus prés de son sujet car il est le sujet. Reste une énigme : comment parvient il à déréaliser, à tout représenter en même temps qu’en l’escamotant? Il faut aller le voir pour comprendre un peu ce qui fait son métier et son génie.
MAI 68 de et avec Philippe Caubère, au Chêne Noir à 21H30 durée 2H00
Crédit Photo : Michéle Laurent