
“Voyage en Ataxie” le sourire de Gilles Ostrowsky au T2G
Gilles Ostrowsky fidèle à lui-même, créé un objet théâtral hilarant et bouleversant. Il y parle de sa maladie neurologique et n’oublie pas qu’il est un magnifique amoureux de la déconne.
Gilles Ostrowsky aime le rire
Gilles Ostrowsky pense le théâtre depuis toujours?; il explore dans son travail différents thèmes?; les questions qui sous-tendent sa réflexion restent les mêmes : comment le rire puise sa force au cœur du tragique. L’auteur est prolixe, le metteur en scène est inventif et le comédien sémillant.
Gilles Ostrowsky est un acteur cinétique ultra-dynamique. Et c’est le sourire aux lèvres que nous nous souvenons de son spectacle halluciné Les fureurs d’Ostrowsky (Avignon 2015) par lequel il s’empare de la terrible histoire des Atrides avec une intelligence jubilatoire. Dans ce seul en scène co-écrit avec Jean Michel Rabeux il démontre qu’il était un grand clown désopilant en nous racontant l’histoire des peu fréquentables Atrides, une famille chez qui on a la fâcheuse habitude de s’entretuer allègrement. Jean-Michel Rabeux et Gilles Ostrowsky ont choisi de faire rire aux éclats à partir de toutes leurs atrocités familiales. Le spectacle fut jouissif.
Gilles Ostrowsky aime toujours la déconne
En 2017, l’artiste perd l’équilibre en sortant de son lit. Le spécialiste de l’équilibre consulté pense à un problème d’oreille interne et prescrit 6 mois de kinésithérapeute. Au bout de 6 mois, son équilibre est encore plus précaire. Il consulte à l’hôpital une neurologue ; elle est sans appel, c’est neurologique. Le début du voyage commence?; il écrit puis co-met en scène avec Sophie Cusset (sa complice de toujours) Voyage en Ataxie pour aborder son cauchemar qui cultive en lui une réflexion sur la vie, sur l’autre, sur la solitude et sur le théâtre ; le résultat est d’une densité rare. Et comme souvent avec les grands clowns, des fausses boursouflures dessinent un discours d’une édifiante finesse.
Le biais se refuse au pathos ou à la coquetterie mélancolique de l’autodérision. Gilles Ostrowsky raconte la maladie, ce qu’elle conçoit chez lui et chez les autres ; il nous offre ce supplément de pensée dont elle lui a ouvert l’accès. Et puisqu’il est un merveilleux clown, il n’oublie pas de nous faire rire, et d’éclairer, preuve à l’appui, la question du comment le rire s’enrichit du tragique. Ces partenaires sont hilarants. Grégoire Oestermann campe pas moins de onze personnages truculents avec un talent constant. Thomas Blanchard danse sur la pliure de son personnage qui est ou n’est pas Gilles Ostrowsky.
La pièce à la scénographie chaste empoigne son spectateur sans respiration sauf les rires. On ne ressort pas indemne de cette pièce d’exception.
Voyage en Ataxie
Texte Gilles Ostrowsky
Mise en scène Gilles Ostrowsky, Sophie Cusset
Avec : Thomas Blanchard, Grégoire Oestermann et Gilles Ostrowsky
Du 10 au 14 mai au T2G, Théâtre de Gennevilliers
Crédit photo Compagnie Octavio
spectacle vu en janvier 2021