
La plénitude de la vie et autres nouvelles d’Edith Wharton: Les premiers pas d’une icône de la littérature américaine
Romancière américaine née en 1862, Edith Wharton est reconnue pour être l’une des plus importantes du XXème siècle. Première femme à obtenir le Prix Pulitzer en 1920 pour son roman Le temps de l’innocence et première femme à être faite Docteur honoris causa de l’Université de Yale, elle est une figure majeure de la littérature contemporaine. La plénitude de la vie et autres nouvelles regroupe les trois premières nouvelles de l’auteure, écrits de jeunesse publiés dans les années 1890. Les éditions Payot-rivages viennent de les rééditer dans la collection Rivages poche.
Jeune femme caractéristique de la haute société New-Yorkaise, ayant beaucoup voyagé en Europe, notamment en France où elle s’installa, Edith Wharton avait tout pour vivre aisément en épouse respectable et en maîtresse de maison au goût raffiné. Mais son attrait précoce pour la littérature va la pousser, dès son plus jeune âge à refuser un destin tout tracé. Alors que certains de ses poèmes sont publiés dans des magazines, à sa plus grande surprise, les éditeurs lui réclament d’autres travaux. Elle sort alors de ses tiroirs trois nouvelles intitulées « La plénitude de la vie », « La lampe de Psyché » et « La vue de Mme Manstey ». Ces premiers écrits, dictés par la fougue de la jeunesse et par un regard sans concession sur la société qui l’entoure, feront entrer Edith Wharton dans le cercle des meilleurs écrivains de son temps.
Déjà, la plume est acérée, le ton ironique et foudroyant. Son sujet de prédilection ? Les femmes. Ici, ce sont trois histoires de femmes, aisées ou modestes que l’auteure s’attache à décortiquer. Avec elles, ce sont ses propres désillusions qu’elle jette sur le papier. De la jeune épouse qui se résigne encore, même au-delà de la mort, à accepter ce que la vie a choisi pour elle, de cette vieille dame qui refuse l’impuissance et qui se bat seule pour laisser son empreinte à cette femme qui, regardant son beau mari, décide de fermer les yeux sur un acte qu’elle juge révoltant, toutes, à leur manière, se font le reflet d’un monde que l’auteure connait bien, un monde intime, bouillonnant où les courants s’affrontent. Ces héroïnes, d’une grande lucidité sur elles-mêmes, se trouvent toutes à un moment décisif où il n’est plus question de naïveté. Pleinement consciente de leur réalité, elles vont se disloquer subitement, s’adapter ou disparaître, dans le silence, la révolte ou les cris.
Edith Wharton fait dire à un de ses personnages que la nature d’une femme est comme “une grande maison pleine de pièces” où, cachée derrière des portes que l’on ouvre jamais, au bout d’un chemin que personne ne connait, se cache la pièce la plus retirée, celle où “l‘âme se tient assise, seule, guettant le pas de quelqu’un qui ne vient jamais”. C’est dans cette pièce que l’auteure nous emmène, fouillant au plus profond de l’intime et mettant au grand jour les contradictions profondes de ses personnages.
Après leur première parution, ces nouvelles furent retirées, à la demande de l’auteure. Exigeante, les considérant comme “les fruits des excès de la jeunesse”, Edith Wharton décida de les laisser de côté, probablement aussi parce qu’elles étaient d’une cruauté sans détour à l’égard de ses congénères et qu’elle ne l’assuma pas. Cette belle réédition leur rend enfin hommage; L’occasion de (re)découvrir les débuts littéraires d’une auteure devenue incontournable.
La plénitude de la vie et autres nouvelles – Edith Wharton
Traduit de l’anglais et préfacé par Maxime Rovere
Editions Payot-Rivages – Collection Rivages poche / Petite Bibliothèque
Parution: avril 2013 – 154p. Prix: 7,65€ – ISBN: 978-2-7436-2543-6
Photo: Edith Wharton (c): Corbis.