Jean-François Fouilhoux, ligne nue
J’écris dans la terre.
Mon crayon ? Une lame flexible que je courbe à volonté.
Mon support ? Un mur d’argile.
Je dessine dans l’espace en déplaçant cette lame à l’intérieur du mur que je tranche dans toute son épaisseur. La ligne est continue, à la manière d’une écriture, et, à l’intérieur de la terre, le volume se forme à l’aveugle, imaginé dans le geste.
La forme se compose alors de deux éléments emboîtés, séparés par un léger espace. On pourrait dire que chacun est le moule ou l’empreinte de l’autre, avec cet espace que Marcel Duchamp définissait comme infra-mince. Ils sont nés du même geste : le déplacement de la lame flexible, dont finalement, seule la trace m’intéresse.
Alors je sacrifie l’une des deux parties, que je détruis pour laisser apparaître l’empreinte du geste.
Trace d’énergie, de tension… Comme le calligraphe, j’ai médité la gestuelle avant de l’exécuter. Une sorte de danse, de rituel, où le mouvement est ample, dynamique, continu et sans remords.
Dégager cette empreinte sensible, épilogue d’un instant privilégié, la vider de sa matérialité, en la réduisant à une peau, puis la faire vivre comme suspendue dans le vide…
Et juste vouloir l’énergie du geste qui se développera dans l’espace…
Encore une histoire de plein et de vide…, récurrente en céramique. Mais c’est aussi celle du céladon, translucide, autre symbole du plein et du vide : à la fois matière et lumière.
Jean-François Fouilhoux