
« L’héritier », de Joost de Vries : Un tout petit monde 2.0
Révélation aux Pays-Bas, le trentenaire qui a fait le buzz avec sa fable drôle et caustique en milieu universitaire débarque en Français pour la Rentrée Littéraire. Attention,chez Joost de Vries, le Métadiscours sur Hitler est autant un ring de boxe testotéroné qu’une Sciences Sociale sérieusement compétitive.
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Lorsque son maître à penser et professeur tutélaire, Josip Brik, meurt brusquement, le jeune et blond Friso de Vos est en mission universitaire (et très malade !) en Amérique Latine. Il manque les funérailles où un usurpateur prend sa place d’ « Héritier ». Philip De Vries, dont il n’a jamais entendu parler, a fait l’éloge de Brik à la télévision. Heureusement, un colloque a lieu à Vienne dans leur domaine de spécialité : le Métadiscours sur Hitler (discipline vaguement Klemperienne dans laquelle Vries cale à la fois un savoir certain sur le champ mais aussi une critique acerbe de la manière dont les Historiens du Troisième Reich ne s’intéressent plus aux faits « ou en tout cas aux faits à découvrir » (p. 65). C’est l’occasion pour le jeune héros de briller dans un débat-duel avec son adversaire sorti de nulle part. C’est aussi le moment pour lui d’usurper une identité pour récupérer un héritage annoncé, où la belle Pippa -sa copine qu’il a lassée- apparaît comme la parfaite cerise sur le gâteau à la crème de l’histoire sombre..
Enlevé, sexy, savant mais juste ce qu’il faut pour mettre l’eau à la bouche, L’héritier est une sorte de « Tout petit monde » de John Lodge revue à la sauce caustique et à la blondeur faustienne des Pays-Bas. On pense autant au dernier livre d’un autre néerlandais qui s’est aventuré dans les histoire de compétition et de coucheries en colloque, Arnon Grunberg, aussi bien qu’à un scénario parfait de SM sexy à la « Fifty Shades » pour intellectuels aimant flirter avec le point Godwin. Un mélange efficace et détonnant qui fait qu’on ne lâche pas l’insupportablement sexy Friso de Vos dans ses périgrinations méta-hitlériennes.
Joost de Vries, L’héritier, trad. Emmanuèle Sandron, Plon, 20, 90 euros. Sortie le
Visuel : couverture du livre.