
Quand l’élasticité des mouvements domine : “Programme mixte” du ballet de Vienne
Le ballet de Vienne, dirigé par l’ancien danseur étoile de l’Opéra de Paris Manuel Legris, a achevé samedi la deuxième partie de sa programmation des étés de la danse au Théâtre du Châtelet : Programme mixte. De la danse contemporaine et néoclassique gardant toujours comme socle la propreté technique de la danse classique. Un univers sensuel à la géométrie précise que les jeunes danseurs de l’Opéra de Vienne maîtrisent à merveille.
Programme : A million kisses to my skin de David Dawson
Eventide d’Helen Pickett
Windspiele de Patrick de Bana
Vers un pays sage de Jean-Christophe Maillot
Les valeurs de la danse classique sont ici poussées à l’extrême et transgressées. Souplesse, grâce et propreté technique dominent le choix de ces quatre ballets, conçus par des danseurs et chorégraphes contemporains. On admire l’exigence technique des jeunes danseurs ; exigence , certainement déjà présente dans l’hommage à Noureev répertoriant les ballets classiques et contemporains dans lesquels Noureev a eu un rôle. A la suite du Programme mixte, le rideau se fermera sur la version de Noureev de Don Quichotte. Après le Palais des Congrès et l’Opéra de Paris, c’était au tour de Manuel Legris de rendre hommage au danseur et chorégraphe prestigieux, directeur du ballet de l’Opéra de Paris de 1983 à 1989, celui aussi qui l’a nommé étoile. Dans Programme Mixte, quatre ballets d’une vingtaine de minutes chacun, tout juste entrés dans le répertoire de l’Opéra de Vienne nous ont été révélés pour la première fois à Paris.
Helen Pickett et David Dawson ont tous les deux dansé pour Forsythe. Dans Eventide, Pickett retrace les différents tons de lumière passant par des oscillations arrondies et charnelles sur les notes du saxophone et des cordes à des déplacements d’automates au rythme des percussions. La musique de Philip Glass et de Ravi Shankar apporte les touches occidentales et orientales et transmet une ambiance étrange et saisissante. Un autre style plus sobre dans les décors dans A million of kisses to my skin qui permet d’admirer les capacités techniques des danseurs. En voulant exprimer la joie et la liberté, David Dawson s’aide du Concerto pour piano n°1 en ré mineur de Bach vif et précis.
Deux chorégraphes issus du Ballet de Hambourg de John Neumeier, Patrick de Bana et Jean-Christophe Maillot. Inspiré de la musique de Tchaïkovski, Windspiele de Patrick de Bana retravaille l’espace et les mouvements. Les danseurs sont frappés par la musique, un lien inhérent encore plus palpable dans les solos rend toute l’ampleur de l’instrumentation et entraîne les danseurs dans une épopée musicale aérienne ; sublimée par les costumes qui épousent le mouvement des danseurs, costumes qui ont été confectionnés par la danseuse étoile de l’Opéra de Paris, Agnès Letestu. Dans une esthétique pure et minimaliste, Jean-Christophe Maillot dévoile la symétrie de la danse. Les danseurs aux gestes mécaniques se muent dans un univers baroque aux tableaux picturaux. Un aspect général épuré qui donne à ce dernier ballet une fraîcheur inégalable.
Un nouveau sens du mouvement qui rappelle la rigueur de la danse mais aussi la liberté qu’elle peut développer pour exprimer des sentiments qui animent les chorégraphes contemporains ainsi que leurs danseurs. Le ballet de Vienne enchante par sa vivacité, on en sort emporté par le plaisir de danser.
Visuel (c) : Michael Pöhn.