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Week-End à Rennes

Week-End à Rennes

30 November 2022 | PAR Julie Viers

Fuir Paris pour assister au Festival du Théâtre National de Bretagne qui prenait fin ce week-end à Rennes, quoi de plus réjouissant. Au programme : en famille cet hiver allez voir (La Bande à) Laura de Gaëlle Bourges, pour rire et pleurer l’incroyable Tenir debout de Suzanne de Baecque, s’instruire et s’émouvoir pour Victor de Oliveira dans Limbo et tenter de comprendre la poésie de François Tanguy dans Par autan

(La Bande à)Laura, un spectacle à voir en famille

La chorégraphe et monteure en scène Gaëlle Bourges présente un nouveau spectacle intitulé La Bande à Laura. Elle revisite l’Olympia de Manet et remet dans le contexte le scandale que l’oeuvre avait provoqué. Pendant un heure vingt, quatre performeuses reconstituent plusieurs tableaux tels que Le Déjeuner sur l’herbe, le Portrait de Laure et bien évidemment Olympia. Cela se déroule dans une lenteur chorégraphique permettant à chacun de voir tous les détails des mouvements, des gestes. Une voix off nous narre l’histoire tout en prenant en compte les questions des genres et plus précisément de représentation des noirs. Ce ballet silencieux est rompu par le Bal masqué à l’Opéra. Celui-ci offre une musique stroboscopique, des danses endiablées qui appellent la joie et les applaudissements du public. Cette nouvelle création de Gaëlle Bourges est une véritable mise en corps de la peinture de Manet.

Prochaines représentations : 

 

Tenir Debout, un spectacle réjouissant 

Suzanne de Baecque, face au public, raconte la genèse du projet : un travail en immersion lui est demandé. Alors elle va participer au concours des Miss Poitou-Charentes. À ses côtés, Raphaëlle Rousseau, que l’on avait adoré dans Discussion avec DS, incarne la coach. Elle lui donne de nombreux conseils sur la démarche, « on ne recule jamais quand on défile, on ne recule jamais quand on est une miss » et lui fait faire du sport devant une salle hilare. Changement de costumes, toutes les deux se confient sur leurs désirs d’être miss, loin des paroles féministes de cette génération, comment elles ont vécu la compétition et leur échec. Elles sont à côté mais ne dialoguent pas, une discussion de sourd à pleurer de rire. Suzanne de Baecque exploite toute la matière qu’elle a récoltée de cette immersion pour réaliser un spectacle total avec sons, vidéos, lumières et costumes qui nous fait passer du rire aux larmes. 

Prochaines dates : 

 

Limbo, s’instruire et s’émouvoir en 1h40 c’est possible 

Debout, habillé tout en noir, il ancre ses pieds dans le sol et ne va plus bouger pendant toute la durée du spectacle. Son corps est une statue mais sa voix porte loin. C’est une grosse voix grave qui sépare bien les mots les uns des autres. Devant une salle remplie, Victor de Oliveira nous raconte ses origines, son arbre généalogique, la colonisation par le sexe qu’a opéré le Portugal au Mozambique et les conséquences. Passant du général au particulier, de ses souvenirs personnels aux faits historiques tels que le terrorisme et la ségrégation. Il adjoint à sa parole des images d’archives et des images familiales. 1h20 pour retrouver ses origines, les siennes mais aussi celles de sa famille, celles des noirs, celles des métisses. Il sera beaucoup question de la couleur de peau et des perceptions que les gens en ont. Très loin d’une conférence sur la négritude et le quotidien d’un métisse, ce spectacle nous fait vivre cela. À travers sa voix, à travers les sons et musiques, à travers les vidéos, chacun prend un peu plus conscience de ces questions. Le spectateur est percuté par les propos tenus et par la mise en scène. Trois immenses écrans forment un U derrière l’acteur et projettent un blanc lumineux ou un noir profond entrecoupé de vidéos. Un spectacle saisissant et passionnant ! 

 

Par autan, la poésie quelque peu aride de François Tanguy

Au sein d’un décor qui ne cesse de se modifier, sept personnages enfin plutôt acteurs vont évoluer dans une mise en scène dissociée des propos tenus. L’histoire se passe en Russie ou en Grèce antique. Il y a des soldats ou un homme portant un gilet pare-balles, Marat et Adam mais aussi Abraham et Iphigénie. L’universel est-il un langage accessible à tous ? Vouloir faire une pièce sur rien, comme Flaubert voulait faire un « livre sur rien », en se détachant complètement de toute forme de narration assèche l’oeuvre. Les spectateurs entendent Shakespeare en anglais, Mendelsohn en allemand, Kierkegaard et Kafka, un peu d’espagnol grâce à Luis de Góngora y Argote et de russe avec Anton Tchekhov. Aucune suite logique, Par autan est une oeuvre déstructurée. Le titre aurait dû nous mettre en garde. En effet, le vent d’autan, surnommé « le vent du diable », est capable de détruite les récoltes, de bousculer nos repères. Métaphore du monde contemporain qui laisse le spectateur face aux complexités. Une fois de plus François Tanguy nous déroute. 

Prochaines dates : 

 

 

Visuels : 

  • (theaytLa Bande à) Laura ©Danielle Voirin
  • Tenir debout ©Jean Louis Ernandez
  • Limbo ©Johana Linda
  • Par Autan ©JeanPierre Estournet
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Julie Viers

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