Un “Hommage à Wolinski” ouvre la saison théâtrale
Où est Charlie ? Il n’était pas au Festival d’Avignon et le triste célèbre bandeau noir ponctué du slogan blanc ne semble pas vouloir figurer sur un programme de la rentrée. Il faut donc aller au Théâtre Dejazet pour voir, comme une archive figée dans son heure de naissance Je ne veux pas mourir idiot, écrite par Claude Confortés d’après des dessins de Georges Wolinski.
Claude Confortès a étudié auprès de Jean Vilar, rien que ça. Juste après le joli mois de mai, il commence une collaboration avec le dessinateur Georges Wolinski. Je ne veux pas mourir idiot sera suivi de Je ne pense qu’à ça, puis Le roi des cons. Nous sommes au tout début de mai 68. De Gaulle ne voit pas comment le pays “pourrait être paralysé par la crise”. Pourtant le 22 mars à Nanterre, les étudiants réunis autour de Dany râlaient contre la non mixité des dortoirs et la guerre du Vietnam..
La pièce écrite et mise en scène il y a 47 ans, notamment au Théâtre de la Commune en octobre 1968, est restée exactement dans son jus en offrant un intéressant jeu de chaises musicales. Georges Beller jouait l’ouvrier, il campe aujourd’hui le journaliste opportuniste. Wolinski lui même jouait un temps le réac, papa gaulliste de la jeune étudiante (Séverine Ferrer). Philippe Ogouz était le journaliste, il est désormais le bon père de famille.
En entrant au Dejazet on découvre une exposition des dessins de Wolinski où l’on retrace l’histoire de son trait. Acerbe, vulgaire, brillant, intelligent. Ce spectacle lui vaut par son existence même mais il déçoit par son rythme et par le jeu des plus jeunes comédiens qui campent des personnages sur-joués. Les chansons d’époque signées par Evariste apparaissent tristement datées. On se lasse rapidement de cette lutte des classes premier degré. La pièce a mal vieilli mais on ne peut que saluer la démarche louable qu’a eu Maryse Wolinski en prêtant les dessins, dont deux, évidement percutants et drôles sont affichés sur la palissade qui occupe une large partie du plateau. On se marre encore en voyant un long bonhomme dire à une fleur “Répète si tu es une fleur”, et la fleur : “Pauvre con !”. On ne peut que saluer l’idée de retrouver les traits derrière les mots. Quand le père annonce à sa fille que l’on est gaulliste de génération en génération, la fille demande si son grand-père aussi était gaulliste ? elle se voit répondre “non, les parents de gaullistes étaient pétainistes ! “.
Un hommage qui déçoit car il manque d’éclairage sur le monde d’après le 7 janvier 2015. Wolinski nous manque plus que jamais. Le pire a toujours de l’avenir.
Visuels : © DR