Théâtre
The Other Voice, Ivo Van Hove dévoile le visage sombre de la Voix Humaine

The Other Voice, Ivo Van Hove dévoile le visage sombre de la Voix Humaine

13 November 2018 | PAR Amelie Blaustein Niddam

Au Théâtre de la Ville, Ivo Van Hove répond à l’insoluble question : Mais que lui dit-il ? Lui, à elle, la femme blessée de la Voix Humaine de Cocteau ? Dans son texte (2016), Ramsey Nasr met le haut-parleur.

La pièce est le pendant de la version glacée de La Voix Humaine que le metteur en scène néerlandais donnait dans ce même lieu, l’Espace Cardin la semaine dernière. Ce n’est pas seulement “lui” qui est entendu mais un nouveau “eux”. Sur scèneRamsey Nasr et  Belinda van der Stoep sont “eux”, le renouveau de l’amour.

C’est donc lui, lui à qui elle a tant parlé. Lui pour qui elle meurt. Et honnêtement il n’en vaut pas la peine. Dans un décor qui résonne avec celui de la première partie, lui est comme elle, chez lui, dans un cadre blanc, mais qui est ici rempli. Un canapé, un bel escalier, c’est presque cosy.

Au début, on est happé par l’écho. On a sans cesse le souvenir de la Voix Humaine. Il est impossible alors de lui trouver des excuses. Contrairement à elle, il ne prend pas le téléphone, il discute en haut-parleur, ordinateur posé sur le sol tout en faisant autre chose.

On comprend rapidement qu’il n’est pas seul. Le spectacle est donc une discussion à sens unique où on entend son son de cloche qui est sans intérêt. Ce qui est intéressant en revanche,  c’est le fait qu’il parle, c’est le fait, finalement, qu’il s’accroche au bout du fil en refusant toujours de vraiment raccrocher.

Tout l’intérêt du spectacle est de montrer une addiction, il y a comme dans Clôture de l’amour de Rambert, l’idée que dans la rupture se cristallise tout l’amour resté en suspens et qui ne peut pas dire son nom, et qui donc, ne se traduit qu’en violence.

Les petites choses du quotidien qui chez elle nous arrachaient le cœur deviennent chez lui des petites merdes qu’il écrase avec mépris. Il est odieux et le métier que lui prêtent Van Hove et Ramsey Nasr dans l’humanitaire semble être un vernis d’égocentrisme supplémentaire.

Un dialogue à deux en solitaire

Le jeu du comédien est juste incroyable, toujours aussi difficile puisqu’il s’agit d’un dialogue à deux en solitaire. Ramsey Nasr est toujours, toujours juste. Qu’il pose sa main dans son pantalon en guise de nonchalance, qu’il ramasse des nouilles pour aller les manger à même le sol, ou qu’il rampe : il n’est jamais ni potache, ni boulevard, ni ridicule.

La lumière de Jan Versweyveld est elle aussi superbe, nous faisant passer du jour à la nuit sans aucune raison rationnelle. Le temps semble éternel ici, et si nous ne savions pas l’issue fatale du pendant à The Other Voice, nous pourrions rire.

Mais nous sommes dans une tragédie. Nous savons, lui pas. Le drame est là. Une rupture est un incontournable de la vie, mais ici elle devient un pistolet armé.

Malgré une mise en scène impeccable et un jeu d’acteurs hors-pair, l’idée, formidable, d’offrir une voix au bout du fil de la fille larguée, s’épuise vite. Finalement, le découvrir n’a pas grand intérêt, on aurait préféré penser qu’elle aimait et se tuait pour quelqu’un de bien. En écrivant la réponse, Nasr coupe l’imaginaire, en tout cas, il donne une version de l’homme et il est peu séduisant.

Visuel : ©Jan Versweyveld

Du 13 novembre 2018 au 16 novembre 2018
Espace Pierre Cardin-Théâtre de la Ville

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