Théâtre
Ma chambre froide, la nouvelle création époustouflante de Joël Pommerat au Théâtre de l’Odeon

Ma chambre froide, la nouvelle création époustouflante de Joël Pommerat au Théâtre de l’Odeon

04 March 2011 | PAR Amelie Blaustein Niddam

L’Odéon accueille cette  année Joël Pommerat en tant qu’artiste associé. C’est aux Ateliers Berthier, où il a déjà montré deux petits bijoux pour le  jeune public, Le petit chaperon rouge et Pinocchio, que nous retrouvons le fou de lumière pour sa nouvelle création, “Ma chambre froide”. Chef d’œuvre.

On retrouve dans “Ma chambre froide” les clés du succès des précédentes pièces, la lumière, la musique, la voix off…l’humour en plus. Joël Pommerat l’avait annoncé lors de la présentation de saison du théâtre de l’Odéon, un peu inquiet, il souhaitait faire de cette pièce sa première comédie. Le pari est réussi car les fous rires sont nombreux au cœur de cet univers plutôt glauque de centre commercial à la musique éponyme.

“Ma chambre froide” nous entraine dans la vie d’Estelle. Jeune fille déjà, elle essaie de se faire passer pour ce qu’elle n’est pas en s’infiltrant dans un couvent. Plus tard, elle travaille comme femme de ménage, un peu trop dévouée selon ses collègues, sous la direction du méchant Monsieur Blocq. De pressions et humiliations, le patron malmène ses employés, un jour, il apprend qu’il va mourir et lègue tout à ses salariés. A une condition, ils devront monter une pièce de théâtre en son honneur.

Sur le plateau rond encadré , comme  au cirque , par le public, les scènes se succèdent dans une alternance extrêmement rapide de noirs et lumières. Le travail de sculpture de la lumière est encore plus abouti que dans les spectacles précédents. “Au Monde “et “Les Marchands” étaient ahurissants de technicité et d’effervescence. “Je tremble” et “Cercles Fictions” commençaient déjà à apporter du relief au décor, ici, le travail semble précis comme jamais, chaque projection au sol transforme l’espace. Nous sommes dans une cave, dans un hôpital, un bar à putes, dans une salle où de la moquette à damier est au sol, dans un hall ou  dans une chambre froide où l’on perçoit la température.

L’univers sonore est toujours au cœur de la mise en scène, on retrouve avec un  immense bonheur les Playlist kitsch que Pommerat adore. Les grands tubes sont au rendez-vous et le public n’hésite pas à remuer un peu. Les compositions musicales d’Antonin Leymarie transforment la perception pour donner plus de réalisme à la scène. Si une porte est ouverte ou fermée, on entend différemment, cet effet est reproduit ici.

Pour monter sa pièce, Estelle se sert de ses rêves et de ses cauchemars. Ces scènes sont les plus incroyables du spectacle, notamment grâce à des costumes d’animaux monumentaux, drôles, et effrayants en même temps. Une idée géniale  qui permet au metteur en scène d’avoir à multiplier les changements de décors et d’ambiance.

Sur le fond, on retrouve la question centrale chez Pommerat du statut des petites gens, de la précarité, de la crainte et du désir du pouvoir. On est face à des personnages féminins en souffrance face à des maris salauds. L’une n’a pas les “compétences”, l’autre danse un bar, celle-là a des doutes sur Estelle et son nombre de frères un peu trop impressionnant.

La mise en abîme de la pièce dans la pièce sonne comme une autocritique, la metteuse en scène est d’humeur changeante, exigeante, et la pièce semble ne pas vouloir aboutir. Le portrait brossé est dur. Ici, pas d’échec, le spectacle est un franc succès et le public est enchanté à l’écoute des nombreux applaudissements. Un grand Pommerat à ne pas rater.

(c) Alain Fonteray.

 

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Amelie Blaustein Niddam
C'est après avoir étudié le management interculturel à Sciences-Po Aix-en-Provence, et obtenu le titre de Docteur en Histoire, qu'Amélie s'est engagée au service du spectacle vivant contemporain d'abord comme chargée de diffusion puis aujourd'hui comme journaliste ( carte de presse 116715) et rédactrice en chef adjointe auprès de Toute La Culture. Son terrain de jeu est centré sur le théâtre, la danse et la performance. [email protected]

13 thoughts on “Ma chambre froide, la nouvelle création époustouflante de Joël Pommerat au Théâtre de l’Odeon”

Commentaire(s)

  • COCARD NICOLE

    J’ai pu voir hier soir, dans l’émission Des mots de MInuits, Joël Pommerat qui a parlé de sa dernière création Ma chambre froide. Il n’y a plus de place disponible à Paris-odéon atelier Berthier.
    J’aimerai savoir si ce spectacle partira en tournée en province et s’il sera visible à Rouen ou la région de Rouen et quand. Merci

    March 24, 2011 at 13 h 19 min
  • Blaustein-Niddam

    Voici les dates de tournée :
    Elbeuf – Cirque Théâtre Elbeuf – Festival automne en Normandie : du 7 au 11novembre :

    Châteauvallon – CNCDC : les 24, 25 et 26 novembre 04 94 22 02 02

    Sénart – Scène nationale de Sénart : les 2, 3 et 4 décembre 01 60 34 53 60

    Villeurbanne – Théâtre National Populaire : du 10 au 14 et du 17 au 21 janvier 04 78 03 30 30

    Nantes – Le Grant T – scène conventionnée Loire Atlantique : du 6 au 10 février 02 51 88 25 25

    Lille – Théâtre du Nord – Théâtre National Lille Tourcoing Région Nord-Pas-de-Calais
    du 13 au 18 et du 20 au 23 mars 03 20 14 24 24

    March 24, 2011 at 17 h 09 min
  • COCHY Marie-Joëlle

    Y aura-t-il une tournée en province pour “La réunification des deux Corées” ? En Bretagne, par exemple ? Merci d’avance.

    January 30, 2013 at 13 h 48 min

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