“L’un de nous deux”, une leçon d’histoire politique, au Petit Montparnasse
Mise en scène par Jean-Claude Idée, la pièce L’un de nous deux de Jean-Noël Jeanneney restitue un dialogue fictif entre Léon Blum et Georges Mandel en juin 1944, lors de leur détention près du camp de concentration de Buchenwald, en Allemagne. Quand la gauche et la droite sont réunies en huis clos dans un contexte mortifère, quelle leçon en tirer ? Un duel philosophique, historique et politique, jusqu’au 1er décembre 2020 au Petit Montparnasse.
Juin 1944. Blum (Emmanuel Dechartre) et Mandel (Christophe Barbier) sont livrés par Pétain aux Allemands et se retrouvent emprisonnés dans une petite maison dont les fenêtres donnent sur le camp de Buchenwald, près de Weimar. Suite au meurtre de Philippe Henriot, Ministre de l’Information de Vichy, par la Résistance, l’un des deux sera exécuté en représailles.
Entre angoisse et espoirs, les deux otages s’adonnent à une joute verbale intense, évoquent leurs visions du monde, leurs parcours inspirés par leurs mentors respectifs : Jaurès pour l’un, Clémenceau pour l’autre.
Un face à face d’envergure
Nous assistons à un face à face d’envergure entre deux personnalités politiques emblématiques que tout oppose : deux camps définis, deux destins en miroir, deux hommes qui vont nous parler de l’histoire politique de la France dans un contexte difficile et de leur histoire personnelle avec leurs convictions et leurs aspirations.
Au fil du dialogue, d’anecdotes en analyse, la tension monte, la conversation s’affute, s’aiguise et en filigrane, on devine l’épée de Damoclès suspendue au-dessus de leurs têtes.
Jean-Noël Jeanneney, spécialiste d’histoire politique, nous offre un texte brillant, servi par deux comédiens incarnés dont la ressemblance avec les personnages politiques réels est troublante.
Une mise en scène concluante
Le décor est élégant, raffiné : une table de billard au centre du plateau, un poste de radio, une bibliothèque et ces grandes fenêtres qui nous ancrent dans la réalité violente et oppressante de la guerre. Des projections vidéo en noir et blanc sur la toile de fond, entre archives historiques françaises et allemandes et reconstitutions nous plongent dans le contexte sombre de l’époque.
Arthur Sonhador, à l’accent germanique renforcé et dont les bottes de cuir crissent à chaque pas, renforce le sentiment d’oppression grâce à son interprétation convaincante d’un jeune soldat allemand.
Un duo/duel humaniste, politique et historique de haute voltige qui donne matière à réflexion.
L’un de nous deux, de Jean-Noël Jeanneney, avec Christophe Barbier, Emmanuel Dechartre et Arthur Sonhador, Au Théâtre du Petit Montparnasse, Jusqu’au 1er décembre 2020. Durée : 1h25.
Visuel : Affiche