Théâtre
“Je suis un prophète, c’est mon fils qui l’a dit”

“Je suis un prophète, c’est mon fils qui l’a dit”

20 June 2012 | PAR Ariane Kupferman Sutthavong

“Mon père est un prophète” : c’est autour d’une pizza Quatre Saisons et un débat plus ou moins houleux avec les amis d’Abel Aboualiten que son fils prononce cette phrase, poussant l’auteur, metteur en scène et comédien à écrire sa pièce. Témoignage drôle et émouvant d’un cheminement spirituel, Je Suis Un Prophète, C’est Mon Fils Qui L’a Dit, relate la difficulté de s’évader du carcan des traditions et de la religion.

Le déroulement de la pièce est avant tout une mise en condition : le spectateur pénètre dans la salle où sont déposées, sous les sièges, des feuilles de menthe fraîche. Je Suis Un Prophète, C’est Mon Fils Qui L’a Dit est une invitation au voyage. Celui-ci se poursuit grâce au jeu sur les sonorités mis en place par Abel Aboualiten ; français, anglais, allemand, les langues s’entremêlent, mais c’est les multiples phrases prononcées en arabe qui nous transportent dans la ville de Tétouan au Maroc, dans le quartier où a grandi le dramaturge.

Le séjour toutefois, n’est pas entièrement rose. Loin des clichés orientalistes, Abel Aboualiten relate de façon crue son rapport à la religion – musulmane, certes, mais également les religions en général – et la façon dont ses pairs le considèrent depuis sa sortie de l’Islam. Le spectacle retrace sa trajectoire religieuse en quelques souvenirs, quelques scènes : sa mère priant et implorant Allah sous les coups que lui donnait son mari, le sacrifice de l’Aïd… Tous ces évènements qui l’ont poussé à questionner, puis à s’en éloigner. Dans sa pièce, l’auteur dit d’ailleurs qu'”Il y a des traditions, des religions qui vous marquent dans votre propre chair et qui saignent votre enfance. Ce fardeau que l’héritage de vos ancêtres, de vos parents, vous impose, vous en débarrasser demande un effort incommensurable.”

Je Suis Un Prophète, C’est Mon Fils Qui L’a Dit est donc une pièce à messages multiples, touchant du bout du doigt la question de la femme dans la société. Abel Aboualiten qui, dans un entretien avec Philippe Bernard, journaliste au Monde, disait se sentir féministe, propose comme fil conducteur la renaissance du prophète en tant qu’être féminin, cependant, il est dommage que cet aspect indistinctement abordé, ne l’ait pas été davantage.

Poésie, humour et engagement se rejoignent dans ce spectacle, donnant lieu à une scène finale exceptionnelle. Abel Aboualiten tout de même aura fini par gagner le Paradis, puisque c’est le nom de la place sur laquelle se jouera son spectacle à Avignon – durant la période du festival – au Théâtre des Amants.

 

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Ariane Kupferman Sutthavong

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