Théâtre
Hate Radio : La radio comme arme de destruction massive…

Hate Radio : La radio comme arme de destruction massive…

05 December 2012 | PAR La Rédaction

A noter : à partir du 5 décembre, toutes les représentations sont suivies d’une brève conférence et d’un débat avec le public sur différents thèmes
autour du génocide.

Depuis hier et jusqu’au 15 décembre se joue au théâtre de la Villette la création de Milo Rau, Hate Radio, qui nous montre la reconstitution d’une émission de la RTLM, la radio rwandaise génocidaire. Dans un studioreconstitué à l’identique sur scène, les comédiens –dont certains ont été eux même victimes de l’horreur- reprennent en direct ce qui aurait pu être une des émissions quotidiennes de la radio de la haine.

Milo Rau et l’IIPM (International Institute of Political Murder) ne nous proposent pas véritablement d’assister ici à une pièce de théâtre mais plutôt de nous faire vivre une expérience. Casque sur les oreilles, le spectateur est plongé dans un univers un peu voyeur, où tantôt il écoute les témoignages de victimes/coupables du génocide, tantôt il se retrouve face au quotidien d’une radio qui paraît pourtant banale, mais qui œuvre peu à peu à la diffusion d’une idéologie raciste. Petit à petit, on en apprend plus sur ce que fut le génocide Rwandais : Le massacre de plus de 800000 Tutsis par les Hutus en moins de 3 mois. On découvre, par les témoignages des victimes, quelle fut l’horreur de cette extermination de masse, mais aussi et surtout, comment une radio a réussi à pratiquer un véritable lavage de cerveau chez ses auditeurs. Entre la musique pop, les reportages sportifs et l’actualité internationale se mêlaient des appels explicites au meurtre.

La pièce nous montre donc cette opposition entre vie quotidienne et atrocité meurtrière, entre divertissement et extermination. Elle se veut très réaliste et analytique, plus que parti pris sur un génocide dont on a déjà entendu parler. Le spectateur se retrouve face à une tentative de compréhension de l’incompréhensible, et c’est bien ce qui est difficile : comment accepter le fait que cette radio a pu déclamer librement et pendant des jours entiers des atrocités pareilles ? Le projet Hate Radio ne nous donne aucune réponse, et nous rend au contraire bien impuissant face à une pensée raciste en pleine maturation. Entre la déshumanisation progressive des uns (les Tutsis), et la radicalisation sauvage des autres (les Hutus), on réalise que le génocide fonctionne malheureusement toujours de la même façon, et que pour y arriver il n’y a qu’un pas.

Malgré des longueurs, la pièce révèle la banalité du mal quotidien, mettant l’accent sur la force des petites phrases aux saveurs en apparence anodines qui agissent, propagande fine, pour faire de chacun un génocidaire en puissance, et ici, en action. Le spectacle dresse un acide portrait des médias qui véhiculent les messages de haine. Ici, les mots mènent à la mort. Une fois de plus, HATE RADIO fait mentir le célèbre Plus jamais ça d’Auschwitz. A nous de rester vigilants.

Juliette Hebbinckuys

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La Rédaction

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