Théâtre
Robin Renucci  met en scène La guerre des salamandres de Karel Capek :  une charmante distraction

Robin Renucci met en scène La guerre des salamandres de Karel Capek : une charmante distraction

23 October 2018 | PAR David Rofé-Sarfati

Le monumental roman de 1935 de Karel Capek, La guerre des salamandres admirablement adapté pour la scène par Evelyne Loew semble avoir été écrit hier. Robin Renucci le met en scène avec joie et pétulance.

La Guerre des salamandres est une folle épopée. Karel Capek nous y adresse avant l’heure un message écologique doublé d’une charge féroce contre la folie qui acte ces apprentis sorciers prêts à sacrifier au profit notre environnement et le futur des générations à venir. Entre récit et représentation, théâtre d’objets, marionnettes et théâtre forain, Robin Renucci nous immerge dans l’aire de jeu pleine de vie et d’aventures du roman.

Au centre de la scène, une grande table ronde en marqueterie figure un board d’actionnaires, comme un centre du monde économico-politique occulte, l’endroit où toutes les décisions seraient délibérées et tranchées. À jardin un échafaudage accueille le  narrateur et parfois les personnages désemparés qui s’y réfugient. L’histoire est fantastique. Un marin a découvert un étrange peuple de salamandres pêcheuses de perles. Ce peuple est réduit par une poignée d’actionnaires cupides en une main-d’œuvre bon marché efficace et servile. L’économie du monde est relancée par cette nouvelle organisation du commerce mondial tandis que les consortiums prospèrent et organisent une guerre commerciale artificielle faite de petits arrangements et de contournements des lois anti trusts.

On l’aura compris, le propos est simpliste, un brin naïf et calibré au complotisme, comme s’il planait encore  le fantôme de l’ancienne maison des Métallos. cette Maison des Métallurgistes haut lieu du syndicalisme, sous la direction de la CGT, inaugurée en 1937 sur les cendres d’une manufacture fabriquant des instruments de musique exportés aux États Unis. (Le lieu est devenu depuis endroit public de création et c’est la chorégraphe Stéphanie Aubin qui vient d’en recevoir la direction en septembre 2018 à la place de Philippe Mourrat)

La mise en scène de Robin Renucci entre le music-hall et Jules Vernes accompagne et amplifie  l’illusion propre à cette fable enfantine. Nous sommes traversés par l’esthétique des années 30 par les costumes et les éléments de décors, par le cirque des années folles, par nos lectures de Jules Vernes. Dans un rêve. Les acteurs brillants et investis deviennent parfois chanteurs ou danseurs On pense à l’excellent Olympia de William Mesguich.

La magie est totale. Le public adhère vite à la richesse du spectacle et à l’abondance des motifs. Malheureusement enfermé par autant de dispositifs le jeu des comédiens peine à s’adresser au public. Nous sommes plutôt devant une fiction TV. Et non convoqué à sa part, le public des théâtreux décroche parfois tandis que les spectateurs plus habitués aux écrans s’enthousiasment pour ce spectacle drôle dynamique, prolifique et foisonnant. Un joli spectacle singulier et consensuel et tout à fait distrayant.

La guerre des salamandres
de Karel Capek
mise en scène Robin Renucci
Crédit Photos Jean Christophe Bardot

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