Théâtre
France Anodine à la Maison des Métallos : L’Emission, une fausse session radio pleine de vrai sens

France Anodine à la Maison des Métallos : L’Emission, une fausse session radio pleine de vrai sens

11 April 2023 | PAR Geoffrey Nabavian

La station de radio fictive France Anodine offre une session qui permet de jubiler. Une suite de petites émissions jouées une heure quinze durant, s’attachant à du micro-humain avec grâce. A vivre encore les 14 et 15 avril.

Cette Emission porte un titre qui permet de redécouvrir un mot : en effet, une heure quinze durant, les trois artistes qu’elle met en scène – et leur invité(e) – font s’enchaîner plusieurs petites “émissions”, au sein de la fausse radio qu’ils font vivre sur scène face au public, radio fictive qui se centre sur les micro-détails de l’existence et du quotidien. On peut davantage interpréter ce titre donc au sens d’émission d’ondes. Et de manière plus abstraite ensuite, au sens d’émission de quelque chose de mouvant, qui se déploie, peut-être pas visible, mais là, sensible.

Cette suite de discussions, d’échanges, de rencontres, de jingles comme à la radio, constitue une performance charpentée et cohérente. Elle met à profit des talents bien particuliers chez ceux qui l’interprètent, et animent sur la scène cette radio fictive nommée France Anodine. Un talent de bruiteuse et de créatrice d’univers sonore d’exception chez Juliette Chaigneau, qui immerge l’auditoire, vers le début, dans une promenade semée de micro-faits narrés de manière piquante. Un départ de chez soi, un déjeuner oublié, un voisin croisé, et des questions… On retient par la suite la capacité d’Antoine Pesle à interpréter des jingles cocasses, et très justes à la fois, via lesquels il parodie avec tendresse certains détails radiophoniques. On jubile lorsqu’il donne à entendre de façon express des recettes de cuisine.

Quant à Dominique Gilliot, iel tient en haleine lorsqu’iel effectue des entretiens à pas feutrés. L’assemblage de micro-faits racontés sur scène et de petites séquences plus burlesques amène progressivement vers d’autres émissions fictives où sont interprétées des chansons plus douces-amères, et vers des glissements vers le quasi drame. Détresse d’une auditrice qui téléphone à une animatrice de la station de radio, a du mal à s’exprimer, et lâche soudain tout avec grande violence, dérapage d’un autre animateur… Cette suite de petits instants se révèle au final rythmé avec grâce.

Surtout, au sein de cet ensemble, la vie et les questionnements circulent. Réfléchie avec beaucoup de finesse, cette performance prend place sur un point d’équilibre où elle en appelle autant au quotidien le plus vrai qu’au théâtral le plus décalé. Avec en prime, la présence d’une ou d’un invité différent chaque soir. La comédienne Sabine Moindrot, première à se lancer, est ainsi, au soir du 7 avril, mise face à des interrogations infimes, l’amenant en douceur à révéler certains pans d’elle-même. Travail, peut-être, à la fois théâtral et radiophonique quand on y réfléchit.

Les 14 et 15 avril, il est encore possible d’assister à L’Emission de France Anodine. La radio fictive organise par ailleurs d’autres événements en ce mois d’avril, au sein de la Maison des Métallos. Parmi ceux-ci, la Démission, dimanche de brunch et d’activités avec aussi des micro-émissions jouées (à vivre le 16 avril) et le Best-of de L’Emission (qui se tiendra le 22 avril). Informations : https://bit.ly/43lmhNF

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Visuel : © France Anodine

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Geoffrey Nabavian
Parallèlement à ses études littéraires : prépa Lettres (hypokhâgne et khâgne) / Master 2 de Littératures françaises à Paris IV-Sorbonne, avec Mention Bien, Geoffrey Nabavian a suivi des formations dans la culture et l’art. Quatre ans de formation de comédien (Conservatoires, Cours Florent, stages avec Célie Pauthe, François Verret, Stanislas Nordey, Sandrine Lanno) ; stage avec Geneviève Dichamp et le Théâtre A. Dumas de Saint-Germain (rédacteur, aide programmation et relations extérieures) ; stage avec la compagnie théâtrale Ultima Chamada (Paris) : assistant mise en scène (Pour un oui ou pour un non, création 2013), chargé de communication et de production internationale. Il a rédigé deux mémoires, l'un sur la violence des spectacles à succès lors des Festivals d'Avignon 2010 à 2012, l'autre sur les adaptations anti-cinématographiques de textes littéraires français tournées par Danièle Huillet et Jean-Marie Straub. Il écrit désormais comme journaliste sur le théâtre contemporain et le cinéma, avec un goût pour faire découvrir des artistes moins connus du grand public. A ce titre, il couvre les festivals de Cannes, d'Avignon, et aussi l'Etrange Festival, les Francophonies en Limousin, l'Arras Film Festival. CONTACT : [email protected] / https://twitter.com/geoffreynabavia

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