Théâtre
Finnegans Wake CH.1 au théâtre de l’Aquarium jusqu’au 19 février

Finnegans Wake CH.1 au théâtre de l’Aquarium jusqu’au 19 février

03 February 2012 | PAR LLT

Depuis le 17 janvier, le metteur en scène Antoine Caubet présente le premier chapitre du dernier livre de James Joyce à la Cartoucherie. Un texte tout en consonances, en résonances, en métaphores et en causticité. Un texte qui lie les origines du Monde et de l’Histoire à l’Irlande originelle.

Lorsque James Joyce (c’était l’anniversaire de sa naissance hier) répond à ses détracteurs à propos de Finnegans Wake (la veillée des Finnegan) en rétorquant “que ce texte n’est pas écrit et n’est pas fait pour être lu. Il est fait pour être regardé et entendu”. Cette phrase prend tout son sens à la vue de la pièce proposée par Antoine Caubet. Sharif Andoura en conteur comédien est époustouflant de justesse et ce chant de mots insensé encensant   qu’il assène pendant 1h30, les oreilles Joyciennes, Lacanienes, averties ou pas, le délectent. Entre sens cachés, multipliés et sonorités lyriques, Antoine Caubet se joue du fleuve de lettres, de consonances et de syllabes du premier chapitre du livre pour le rendre parlant aux gens, sans dénaturer aucun propos du génie de James Joyce.

Fond noir, la lumière fait apparaître, avec ce qu’il faut d’intensité, le comédien, seul sur scène, dans une sorte d’arène octogonale ensablée. A ses côtés, le vieux Finnegan n’est plus que marionnette, suspendu aux fils de la vie, pour quelques secondes encore. Et oui, cela débute ainsi, avec la mort de F., qui errera tout le reste du temps dans le ciel dublinois où un méli-mélo d’Histoire et d’origines l’attendent. Incipit: Finnegan se trouve sur une échelle, un mur est dressé devant lui, il a bu plus que de raison. Tout en faisant un mouvement de va-et-vient avec l’organe propre aux hommes, il songe à sa femme ALP, à sa fille  et à la rivière Liffey qui traverse la ville. La Liffey-femme-rivière comme sources de fantasmes et de perte. Comme les hommes ne savent pas faire plusieurs choses à la fois, ce qui devait arriver arriva, Finnegan chuta. Mais par chance et surtout par la volonté de son auteur, Finnegan ressuscite.

Et là, la voix de Sharif Andoura entonne des maux en mots, des phrases pleine d’extase que l’œil n’oserait déchiffrer et que les oreilles prennent plaisir à faire raisonner. Les aventures d’outre tombe et oniriques du personnage peuvent commencer. Finnegan ou l’auteur se lance dans une sorte de psychanalyse intemporel où se retrouvent pèle-mêle les civilisations et les cultures qui ont fait et font le monde, là, dans le ciel grisâtre de Dublin.

Cette pièce, Antoine Caubet rêvait de la présenter depuis de années mais le petit fils de James Joyce n’est pas partageur et ce n’est qu’une fois tombé dans le domaine public (en 2011) qu’il a pu faire de ce texte un délice des sens. L’auteur d’Ulysse a mis plus de 17 ans à écrire l’intégralité de Finnegans Wake appelé initialement Work in Progress. Certains de ces admirateurs l’ont même aidé à terminer ce roman fleuve de 900 pages. Des admirateurs de talent comme le jeune Samuel Beckett.

A sa sortie en 1939, le texte a rencontré bon nombre de critiques. Des accusations virulentes disant que le livre était l’oeuvre d’un esprit fou, qu’il était incompréhensible voire illisible. Mais la théâtralisation de l’oeuvre par A.Caubet de Joyce démontre le contraire. Finnegans Wake est fait pour être “regardé et entendu”.

visuels(c): Hervé Bellamy

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