
En transit, Amir Reza Koohestani chez Kafka
En transit est une histoire vraie. En 2018 Amir Reza Koohestani se retrouve au pays d’Ubu Roi coincé lors d’une escale à Munich. En 2022, cela devient une pièce très bien menée qui rappelle que l’exil est toujours aux portes.
Dans ses précédentes oeuvre, Hearing et Summerless, le metteur en scène nous racontait, en filigrane, la censure qui pèse sur la création dans son pays. Sur la forme, En transit est dans la même veine, celle d’un fait divers qui devient universel et où la vidéo permet de faire des focus sur des visages ou des détails.
“Il faut bien continuer à fuir quand on est réfugié”
Elles sont quatre (Danae Dario, Agathe Lecomte, Khazar Massoumi, Mahin Sadri). Elles parlent anglais, farsi, français. Elles jouent autant les hommes que les femmes. La pièce est un deux en un. En transit puise dans le roman Transit d’Anna Seghers. L’oeuvre littéraire raconte un départ vers le Brésil rocambolesque en 1943 à Marseille sous fond d’antisémitisme et de collaboration.
Dans l’élégant décor tout rectangulaire et gris clinique, la folie administrative se met en route avec sa cohorte de formules valises : “c’est le règlement”. Elle peut rendre fou cette formule : “c’est le règlement”. Ces mots qui bloquent des réfugiés aux frontières. Le metteur en scène n’a rien d’un réfugié et toute la pièce montre comment, pour une erreur administrative, une maladresse, il se retrouve dans la peau d’un homme voulant fuir la guerre ou un régime hostile.
De plus, la pièce avance, aidée par des panneaux coulissants qui font référence aux portes infranchissables des aéroports quand un papier manque. Dans sa direction d’actrices, Amir Reza Koohestani nous installe dans ces attentes interminables et pleines d’angoisse. Il s’amuse à leur faire parler cet anglais bancal, devenu le dénominateur commun du langage et de la communication.
Les allers-retours entre les deux fictions, celle du livre et celle de la pièce, s’articulent très bien au point de se confondre pour ajouter de l’absurde à l’absurde à cette situation qui n’a ni queue ni tête.
Jusqu’au 14 au Gymnase du lycée Mistral ( super bien climatisé !) à 18h. Durée 1H20.
Visuel : © En transit, Amir Reza Koohestani, 2022 © Magali Dougados
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