Théâtre
« De nos Jours » : regard(s) acrobatiques sur notre temps

« De nos Jours » : regard(s) acrobatiques sur notre temps

16 April 2012 | PAR Celeste Bronzetti

Reprise au Théâtre Monfort du 17 décembre au  5 janvier

Dans le cadre de Hautes tensions, la Grande Halle du parc de La Villette a présenté De nos jours. À l’affiche aussi du jeudi 19 au dimanche 22 Avril. Un groupe de quatre artistes sous un même nom, celui de Ivan Mosjoukine. Il vaut mieux dire : une danseuse, un acrobate, un chanteur à pédales et une actrice proposent 4 différents points de vue d’une même idée du cirque contemporain.

La fragmentation, sujet de notre dernier dossier, se présente comme le vrai moteur du spectacle : une suite de performances, acrobatiques, absurdistes, comiques répètent les bredouillements De nos jours. Ivan Mosjoukine est le cinquième personnage, absent sur scène mais duquel les quatre artistes s’inspirent : son image avait été utilisée par le réalisateur Koulechov afin de démontrer le célèbre « effet K » et l’importance du montage dans les messages transmis à travers le cinéma.

Des notes fragmentées sur notre époque

De nos jours ne transmet pas un véritable message, il stimule plutôt des réflexions sur les multiples sens qui parsèment nos vies : d’ailleurs, quand il y a un sens, il se présente à nous, de façon si rapide et fugitive que souvent on n’arrive pas à les saisir. C’est exactement cette rapidité, voire schizophrénie de l’époque contemporaine que le spectacle met en scène si brillamment. À travers la maitrise de ces quatre artistes extraordinaires qui se proposent, à travers leur corps et leur travail physique, de donner (ou de re-donner) la parole au cirque.
Mais le cirque “de nos jours”, selon le groupe Ivan Mosjoukine, ne pourra pas se dérober de l’influence du cinéma, de la collaboration avec le théâtre, ni de la responsabilité d’inventer une parole nouvelle, propre au cirque. La parole, interdite au cirque depuis 1807, apparaît pendant le spectacle, mais  elle se présente le plus souvent sous forme de cri : elle sert plutôt à mettre en lumière l’échec à dire, l’hésitation, les discours vides de nos rencontres quotidiens.

Une mise en question du cirque

Au cœur du spectacle il y a des corps, avec toutes leurs possibilités expressives, des corps qui parlent de tristesse, d’étouffement, d’errance, d’amour, d’euphorie.
Sur un écran qui ressemble à celui qu’on retrouve au supermarché ou à la poste quand, muni d’un ticket, on attend notre tour, une numération commence au début du spectacle. Quand le spectacle finit on est au numéro 69 : cela correspond au nombre des performances fulgurantes auxquelles on a assisté. Il n’y a aucun entracte, ni intervention technique sur la scène. Les artistes sur le plateau transforment en temps réel leur propre scène et, sous les yeux des spectateurs, ils interprètent leur propre mise en question des clichés autour du cirque.

Les réflexions poursuivent…

Avec un escalier mécanique, un mât, une corde volante et beaucoup d’autre petits objets, il reproduisent les gestes machinaux de la montée au pouvoir, nos combats quotidiens pour survivre, la force physique qui peut ressortir de notre peur de la mort. À travers quelques petites références aux présidentielles qui s’approchent, De nos jours respecte le propos du titre : représenter notre actualité. Et il y arrive de façon pénétrante.

Une figure marche du fond de la scène jusqu’au premier plan pendant que les autres acteurs lui font changer d’aspect afin de représenter les changements de la vie d’un homme. De l’image d’un gamin, sac-à-dos et baskets, ils taillent, à l’aide d’une veste et d’un flacon de talc, celle d’un vieillard tremblant devant la télé. C’est la séquence finale du spectacle, mais aussi celle qui le résume au mieux.

Une critique aiguë de notre société, un regard perçant sur le corps de l’homme et l’importance de son apparence, des Notes on the circus que ces artistes absolus nous invitent à poursuivre.

Visuel © DR

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Celeste Bronzetti

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