Théâtre
De l’humour et du sérieux – Clémentine Yelnik : D’où va-t’on ?

De l’humour et du sérieux – Clémentine Yelnik : D’où va-t’on ?

09 April 2013 | PAR Smaranda Olcese

PaquesJoyeuses2013Le théâtre est petit mais accueillant, l’équipe chaleureuse, le public au rendez-vous. Clémentine Yelnik pose sur le plateau sa lourde besace de globe trotteuse, vocation que ses chaussures de marche trahissent également. Ce soir, et jusqu’au 14 avril, elle est Victoire Coschmik, enveloppée dans un manteau bleu centré sur la taille, des écouteurs sur ses oreilles. Des interférences sonores accompagnent son entrée en scène, mais très vite la connexion finit par s’établir.

Les spectateurs apprennent avec surprise qu’elle est en duplex radiophonique avec un journaliste dont les interventions en voix off vont accompagner le déroulement de la pièce. Instance extérieure, le journaliste va nous donner des informations sur notre hôte, en naviguant avec une aisance certaine dans les 807 tomes réunissant les écrits inédits de Victoire Coschmik, rassemblés sous le titre Désespoir amoureux de l’homme. Comédienne, auteur et metteur en scène, Clémentine Yelnik avoue avoir imaginé son personnage comme le fruit de tous ceux qu’elle a créés et joués depuis 30 ans. Le visage est un peu trop blanc, un nez de clown bleu va l’affubler vers la fin de la pièce. Le ton est donné, Victoire Coschmik s’avance sur le fil tenu entre un humour parfois radical, le plus souvent attendri, et un terrible sérieux. Son regard est sans concession. Pourtant, le texte ne dispense pas de jugements, il construit de subtiles mises en perspective à partir d’observations acérées du quotidien.

Quelle meilleure façon d’engager un échange que de se placer sous les auspices d’un simple Bonjour qui tarde parfois à venir ? Avec une fantaisie débordante, notre hôte revient sur le sacré travail accompli depuis la préhistoire pour l’imposer. Des formules d’une troublante poésie ponctuent sa traversée enjouée des époques. Ainsi ce plaidoyer inspiré pour tenter l’amour, expression capable d’embrasser la fragilité de l’approche de deux êtres, contre le fonctionnalisme volontariste de la formule consacrée.

d4ab1ce19bc5Napoléon, Galilée, Bach se succèdent dans son récit qui garde, malgré de périlleux sauts dans le temps, son entière cohérence. Ce même regard espiègle nous met sans difficulté en présence des inquiétudes métaphysiques des hommes de Neandertal et pointe l’absurdité de la course effrénée au progrès technologique et les aberrations qui en découlent. D’ailleurs, le rythme s’accélère et le futur appelle des inflexions plus dramatiques, sans pour autant chasser tout espoir. Victoire Coschmik triomphe, avec la pugnacité d’un coureur de fond, elle réussit à transmettre au public quelque chose de son enthousiasme phénoménal. Son Désespoir amoureux de l’homme devient communicatif. En guise de fin, rendez-vous est donné pour une prochaine fois, ici ou ailleurs, mais toujours connecté avec la marche du monde.

N.B : Clémentine Yelnik prépare avec Marie Montegani un nouveau projet sur Camille Claudel.

Infos pratiques

Mona Bismarck American Centerfor Art and Culture
Festival Aurore Montreal
Smaranda Olcese

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