Corsetti met du plomb dans le Chapeau de paille de Labiche
Au théâtre éphémère de la Comédie-Française, Giorgio Barberio Corsetti réalise une mise en scène joyeusement frénétique mais trop démonstrative et sans finesse du Chapeau de paille d’Italie en plongeant Labiche dans une ambiance seventies plouc.
On reconnaît à Giorgio Barberio Corsetti l’audace et l’inventivité avec lesquelles il réinvente la forme du vaudeville, en dépassant volontiers les codes et conventions attachés au genre. Le décor bâché sur lequel s’ouvre le spectacle n’est-il pas le signe d’une mise en chantier salutaire d’un théâtre hyper conventionnel à bousculer enfin ? Corsetti signe avec Massimo Troncanetti une scénographie originale et judicieuse qui pulvérise le traditionnel salon bourgeois au profit d’un éclatement et d’une distorsion quasiment dadaïstes.
Le problème vient de sa mise en scène fouillie. Une surabondance de gags, de lourds effets, de commentaires qui autour d’une intrigue aussi mince (la course trépidante d’un jeune homme, qui pour sauver l’honneur d’une épouse infidèle et son mariage, part à la recherche d’un substitut de chapeau mangé par son cheval) parait bien inutile. Cette manière de faire un sort à chaque tirade, de susciter le rire avec insistance, de vouloir épater, cela rend le spectacle pénible, même s’il est impeccablement huilé.
Le plaisir que les acteurs prennent ne fait pas l’ombre d’un doute. Sur un plateau survolté, ils s’éclatent, chantent, dansent, bougent, sautent, plus ou moins périlleusement, mais le jeu est poussif et peu féroce. La belle troupe du Français travaille avec ardeur ces dernières saisons à redonner ses lettres de noblesse à la comédie légère. Comme dans le dernier Fil à la patte de Feydeau, Christian Hecq est la pépite du spectacle dans le rôle de Nonancourt. Il fait hurler de rire avec un art clownesque qui paraît chez lui inné et toujours renouvelé. La difficulté et l’effort pour se hisser à son niveau dans ce registre sont trop visibles chez ses camarades moins à l’aise. Pierre Niney est un Fadinard léger et tourbillonnant, d’une fraîcheur et d’une endurance assez irrésistibles, mais le jeu est souvent tendu et essoufflé. Danièle Lebrun ou Véronique Vella sont épatantes sans en faire des tonnes pour autant tandis que la majorité des autres acteurs sont excessifs, trop en force. La dimension outrancièrement guignolesque de certaines compositions les rend maladroits et pas toujours justes. Ils sont accompagnés par une création musicale festive et bigarrée (d’inspirations jazz, rock et rap) mais trop répétitive de Hervé Legeay et deux acolytes.
Photo © Christophe Raynaud de Lage
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