Théâtre
Circulaire du service des instruments de mesure ou la contre utopie de Roland Shön

Circulaire du service des instruments de mesure ou la contre utopie de Roland Shön

21 December 2012 | PAR Amelie Blaustein Niddam

Quelle expérience ! Aller au Grand Parquet pour croire y voir une pièce de théâtre, déambuler dans les rues du XIXe pour assister dans une piscine à Circulaires du service des instruments de mesure, pas de doute, voilà 34 ans que Roland Shöne mêle poésie, peinture et théâtre. Voici un spectacle 100% déroutant et performatif.

Quitter la ville pour aller se reclure, passer sous le métro aérien, commencer à plonger dans l’incertitude. Mais où va-t-on ? A la piscine nous dit l’homme-guide… Et ce sera vrai. Pas dans le bassin mais dans une minuscule salle attenante, noir de noir, exiguë de chez exiguë. Un autre homme se tient devant un cube lumineux, il nous demande de piocher des cartons sur-lesquels sont inscrits des chiffres romains. On s’exécute. On s’assoit, fébrile, le numéro serré dans la main. Roland Shön entre en scène. Il récupère notre trésor et commence à parler. C’est parti pour 53 minutes de théâtre. Parce que jusque là cela ne comptait pas ?

Bien sur que si, Circulaire nous rend acteurs d’une contre-utopie. Dans un futur que l’on imagine lointain, les interdits fleurissent, des plus foutraques : pas de pistolets à eau à la plus acide : interdiction de lire des textes en public.

C’est cela que nous allons faire, entendre le banal devenu interdit dans une ambiance de bunker. Une drôle de machine, véritable cabinet de curiosité se déploie tout en faisant défiler les peintures et les films d’un inconscient troublé.

Le banal ce sont des textes, ce sont des circulaires que l’homme a rédigé pendant 25 ans. Elles parlent des mesures, du travail, du rôle du Grand Arpenteur qui “ne les comptait plus les rires parfois s’ils n’avaient pas leurs crocs les sourires toujours quand ils frétillaient en éclairs d’argent sur les lèvres des enfants”. Devenues illégales, il s’agit de refaire vivre ces circulaires administratives de façon cachée. Tout comme à l’image de ce casier de métal dans lequel tout un imaginaire est planqué, prêt à se déployer où l’art a remplacé les graphiques.

Roland Shön propose ici une plongée sinoque qui s’inscrit dans un triptyque. Circulaire vient après Ni Fini ni Infini et Gyromance. Chacun met en jeu une machine à image.

Le trouble est semé, la sensation d’écouter une chose rare est là. Qui a dit que les livrets de comptes ne pouvaient être que rébarbatifs.

Visuel : (c)Paul Bonmartel

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Amelie Blaustein Niddam
C'est après avoir étudié le management interculturel à Sciences-Po Aix-en-Provence, et obtenu le titre de Docteur en Histoire, qu'Amélie s'est engagée au service du spectacle vivant contemporain d'abord comme chargée de diffusion puis aujourd'hui comme journaliste ( carte de presse 116715) et rédactrice en chef adjointe auprès de Toute La Culture. Son terrain de jeu est centré sur le théâtre, la danse et la performance. [email protected]

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