Théâtre
“Chère chambre”, la fin d’une vie

“Chère chambre”, la fin d’une vie

26 January 2022 | PAR Lucine Bastard-Rosset

La metteuse en scène Pauline Haudepin présente sa nouvelle création artistique Chère chambre au Théâtre de la Cité Internationale du 17 au 29 janvier. Une pièce de théâtre qui plonge au cœur d’une famille touchée par le deuil.

La mort et le deuil

La trame narrative de Chère chambre se résume en quelques phrases. Chimène Chimère, 20 ans, est atteinte d’une maladie incurable qu’elle a attrapé après s’être offerte le temps d’une nuit à un homme. Face à sa mort prochaine et inéluctable, ses parents et sa compagne tentent de donner du sens à son acte et d’imaginer la vie sans elle.

Comment affronter une mort ? Comment survivre après une mort ? Comment accepter une mort ? Le deuil est un sujet universel qui terrifie. Perdre un être cher est une idée insupportable qui paraît insurmontable. Et pourtant, il faut le dépasser et continuer à vivre, malgré tout.

Chère chambre s’empare de ce questionnement autour de la mort et du deuil. A travers un texte porté par une écriture très poétique où les mots sonnent avec justesse, Haudepin dresse le portrait de trois personnages qui réagissent chacun à leur façon face à la mort. Leurs faiblesses, leurs peurs, leurs sentiments, leurs tourments et leurs désirs ressortent et se confrontent. Ils font face aux questions qui les troublent au plus profond, ils expriment ce qu’ils ont réprimé toute leur vie.

Une création où les arts se mélangent

Chère chambre est une création qui se place au-delà des frontières artistiques, dans un lieu où les différentes formes d’art se mêlent et se nourrissent les unes des autres. Le théâtre, la danse, le dessin ; toutes ces pratiques se retrouvent étroitement imbriquées et liées. Il en ressort un spectacle hybride, à l’image du personnage Theraphosa Blondi. Ce dernier est une créature incarnée par Jean-Gabriel Manolis, un danseur de butô. Le butô est une danse née au Japon dans les années 1960 qui se traduit littéralement comme la “danse du corps obscur”.

Theraphosa Blondi est le premier personnage à apparaître sur scène. Son nom renvoie à celui d’une araignée : la mygale géante theraphosa blondi. Présent sur le plateau avant même le début du spectacle, il se déploie au sol dans des mouvements rappelant celui d’un insecte. Son corps se désarticule, il ne semble pas humain. Cette première image est marquante et dérangeante. Elle annonce le côté onirique de la pièce et met au premier plan cette créature qui “met en contact les personnages avec leurs limites et leur folie”, comme l’explique la metteuse en scène.

Ce mélange de la danse et du théâtre donne lieu à de très belles scènes qui puisent leur puissance dans la gestuelle. Les corps expriment ce qui ne peut être dit, ils parlent à travers une langue universelle. Chimène, qui a du mal à communiquer, en vient à danser sur scène à plusieurs moments. Ses gestes sont doux, lents, très touchants.

Une pièce traversée par une forte vitalité

La scénographie de Chère chambre réalisée par Salva Bordes contribue à l’évolution de la pièce. Les décors changent, se transforment, nous faisant passer de l’univers fermé d’une chambre à un univers plus éclaté, où se mêlent différents lieux et temporalités. Au sein de ce décor, les lumières forment des images très dessinées, où les ombres flottent dans l’air, où les couleurs instaurent une ambiance particulière.

La scénographie est habitée par des personnages traversés par de multiples émotions. La situation à laquelle ils font face les pousse dans leurs retranchements. Ils se dévoilent, les filtres et les barrières tombent. La comédienne Dea Liane propose une prestation dont l’énergie ne tarit jamais. Elle passe de la colère à l’effondrement avec beaucoup de délicatesse, on ne peut rester indifférent à sa souffrance.

Cette pièce de théâtre de Pauline Haudepin propose une immersion dans un monde poétique, onirique. Elle est remplie de trouvailles visuelles, les personnages sont émouvants et le texte brillamment écrit. Il sonne aux oreilles avec justesse, un rythme s’installe, celui des mots.

Visuel : © Jean-Louis Fernandez

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Lucine Bastard-Rosset
Après avoir étudié et pratiqué la danse et le théâtre au lycée, Lucine a réalisé une licence de cinéma à la Sorbonne. Elle s'est tournée vers le journalisme culturel en début d'année 2022. Elle écrit à la fois sur le théâtre, la musique, le cinéma, la danse et les expositions. Contact : [email protected] Actuellement, Lucine réalise un service civique auprès de la compagnie de danse KeatBeck à Paris. Son objectif : transmettre l'art à un public large et varié.

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