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[Avignon Off] “Les résidents” nous confrontent au naufrage de la vieillesse

[Avignon Off] “Les résidents” nous confrontent au naufrage de la vieillesse

14 July 2016 | PAR Amelie Blaustein Niddam

Cette année le Festival d’Avignon parle de mort, et comme toujours, les sujets du “In” se reflètent dans le “Off”. Mais il est généralement question de massacres, de disparitions. Emmanuelle Hiron et Laure Jouatel vont plus loin avec un spectacle d’une violence inouïe qui s’attaque à la fin de vie dans les yeux d’un gériatre. Aussi puissant qu’anxiogène.

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Faire parler les vieux, faire entendre que la “fin de vie”, c’est encore “la vie”, faire entendre que c’est une réalité et que l’on va tous, ou presque y passer tel est le credo des Résidents. Car si vieillir est inéluctable, tout le monde n’a pas la chance ou ici, la malchance de vieillir.  Dans un procédé propre au théâtre documentaire, la comédienne Emmanuelle Hiron devient Laure Jouatel, 37 ans, médecin en gériatrie dont elle a avalé et ingéré la vie et le métier insoutenable qu’elle aime tant.

Derrière elle, un écran nous confronte aux conditions de vie en maison de retraite.  Elle le dit “notre société ne nous prépare pas”, Et c’est absolument vrai. On connait la mort si on l’a croisée et on connait la démence de la fin de vie si elle a fait partie de notre famille.

Ce que l’on voit est horrible.  La conscience n’est plus là, la surdité dévore. Le personnel médical est beaucoup montré et leur travail est incroyable . Qu’il est compliqué de garder l’élégance , de parler avec intelligence quand en face la raison se barre. Et ils le font : conserver la pudeur, cultiver la beauté, danser, séduire…

Ces gens-là sont des héros. Emmanuelle Hiron sème le trouble, elle est vraiment médecin ici. Mais quelle étrange spécialité  :”la gériatrie n’est pas un organe”.

Ni vieillir, ni mourir ne sont des maladies. C’est cela qui est le plus dur à admettre et c’est cela qui rend ce spectacle si dur à encaisser.

Les résidents est une oeuvre belle et courageuse, à ne pas mettre devant tous les yeux.

Les Résidents Teaser 1 from emmanuelle hiron on Vimeo.

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Amelie Blaustein Niddam
C'est après avoir étudié le management interculturel à Sciences-Po Aix-en-Provence, et obtenu le titre de Docteur en Histoire, qu'Amélie s'est engagée au service du spectacle vivant contemporain d'abord comme chargée de diffusion puis aujourd'hui comme journaliste ( carte de presse 116715) et rédactrice en chef adjointe auprès de Toute La Culture. Son terrain de jeu est centré sur le théâtre, la danse et la performance. [email protected]

2 thoughts on “[Avignon Off] “Les résidents” nous confrontent au naufrage de la vieillesse”

Commentaire(s)

  • Petisoff

    Bonjour,

    Les mots sont importants.

    “Naufrage”, “spectacle d’une violence inouïe”, “la malchance de vieillir”, “métier insoutenable” (pour parler d’une médecin gériatre), “horrible”.

    Je n’ai pas, personnellement, cette définition de la vie et de la vieillesse.

    Je ne suis pas certain qu’un témoignage sur la vieillesse soit plus insoutenable qu’un spectacle du “in” qui utilise des images de charniers.

    Je Veux bien admettre le fait que nous ayons tous des façons différentes de regarder notre avancement dans la vie, je ne considère pas la future vieillesse comme une maladie, l’analyse proposée dans cet article n’est pas celle que je ressent devant ce spectacle.

    Je considére le vieillissement comme une chance, “il n’y a pas de meilleure façon de vivre que de vieillir”, et quand la raison se barre, j’espère qu’il y aura suffisamment de médecins passionnés pour me prendre en charge (et pourvu qu’ils ne trouve pas leur condition de médecin abominable comme le terme utilisé dans le regard que vous portez sur le propos du spectacle).

    Les résidents est une œuvre belle et courageuse, à mettre devant tous les yeux qui posent un regard bienveillant sur nos vieux et qui respecte la vieillesse.

    Je comprends que l’on puisse avoir une réaction d’effroi face à son propre vieillissement mais les mots sont importants, veillons à ce que certains adjectifs ne paraissent pas déplacés.

    Nicolas Petisoff

    July 22, 2016 at 5 h 23 min

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