Opéra
Yes ! de Maurice Yvain : une folie où l’extravagance est vertu

Yes ! de Maurice Yvain : une folie où l’extravagance est vertu

24 December 2019 | PAR Victoria Okada

Jusqu’au 16 janvier, le Théâtre de l’Athénée offre une véritable fête avec Yes ! de Maurice Yvain, joyeusement porté par La compagnie Les Brigands. Avec cette production haute en couleur, le Palazetto Bru Zane frappe encore fort dans le domaine « bouffe et léger ».

Chaque année, à la période de la fête de fin d’année, on va à l’Athénée pour s’amuser. Et dans Yes ! tout le monde s’amuse, aussi sur le plateau que dans la salle. La joie de jouer cette partition conçue pour deux pianos est plus que visible sur le visage des ingénieux Paul-Marie Barbier et Thibault Perriard. Ces pianistes hyperpolyvalents deviennent selon les besoins vibraphonistes et guitaristes ; Thibault Perriard, également batteur, transforme tout ce qu’il touche en percussion. A eux se rejoint le contrebassiste Matthieu Bloch qui donne des couleurs et épaisseur indispensable aux numéros de chants et de musiques des années folles fortement influencées par le jazz.

L’opérette est certes une œuvre emblématique des années folles, mais dans la représentation, rien n’est nostalgique. L’histoire qui frôle l’absurde, due au livret de Pierre Soulaine et René Pujol adroitement construit avec seulement les essentiels et aux « lyrics » d’Albert Willemetz, avance à un rythme effréné grâce aux dialogues parsemés de gags et de jeux de mots. En effet, le mouvement dada, qui a pris fin vers 1920 est encore frais dans la mémoire collective à la création de Yes ! en 1928. Dans cette succession de scènes à une cadence infernale, du salon d’un appartement bourgeois du 16e arrondissement de Paris à Londres, en passant par Le Touquet, les personnages invraisemblables — César (Mathieu Dubroca) majordome et candidat communiste aux élections à la circonscription du quartier chic, Roger (Flannan Obé) coiffeur et chanteur censé être en vue du music-hall, Mme Saint-Aiglefin (Anne-Emmanuelle Davy) et son mari cocu sans le savoir (Gilles Bugeaud), Lady Winchester (Caroline Binder) qui entretient par intérêt son très vieil époux (en poupée en fauteuil), ou encore Marquita Negri (Emmanuelle Goizé), riche héritière chilienne dévoreuse d’homme — gravitent autour de Gavard père, le tyrannique roi du vermicelle (Eric Boucher) et son fils Maxime (Célian d’Auvigny), ainsi que Totte (Clarisse Dalles), leur manucure. Le magnat veut marier son fils à la Chilienne mais pour échapper à ces épousailles forcées et sur le conseil de sa maitresse Mme Saint-Aiglefin, Maxime contracte à Londres un mariage blanc avec Totte.

 

Une fois arrivés à la capitale britannique, les deux jeunes gens tombent véritablement amoureux l’un de l’autre… Chaque protagoniste, répartie de manière équilibrée, apporte sa part de folie, aussi sur le plan vocal que sur le jeu d’acteur.Si les uns sont plus acteurs que chanteurs, c’est justement ce mélange de qualités qui font naître une magie… extravagante ! Cette extravagance est savamment organisée par deux metteurs en scène Vladislav Galard et Bogdan Hatisi, qui savent mettre parfaitement en avant le talent des chanteurs lorsque la musique prend dessus, aussi bien celui des acteurs dans des dialogues. Parmi les chanteurs, notons tout particulier Clarisse Dalles, encore étudiante au Conservatoire National Supérieur de Paris, qui se fait remarquer avec la clarté de son timbre et de ses phrasés. Le tout se déroule dans une scénographie autour de deux pianos, légère mais tellement bien pensée de François Gauthier-Lafaye éclairée par Yvon Julou et dans les costumes années 1920 façon music-hall, de Benjamin Moreau qui donne une touche de plus pour la réussite du spectacle.

Si vous voulez oublier des tracas quotidiens et passer un bon moment à Paris, c’est « le » spectacle qu’il faut voir !

Jusqu’au 16 janvier. Les informations sur le site du Théâtre de L’Athénée

photos © Michel Slomka

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