Opéra
Une création de Faust mystique au Grand Théâtre de Genève

Une création de Faust mystique au Grand Théâtre de Genève

02 February 2018 | PAR Yaël Hirsch

Alors que 2018 marque les 200 ans de Charles Gounod, le Grand Théâtre de Genève entame l’année à l’Opera des Nations avec une nouvelle version de son emblématique Faust (1859).

C’est Michel Plasson qui retrouve avec brio la conduite de l’opéra de Gounod auprès de l’Orchestre de la Suisse Romande, après en remplacement de dernière minute de Jesús López Cobos souffrant. Ce Faust aux dix « tubes » où cela chante tout le temps sur plus de trois heures de spectacle est mis en scène par l’ancien Directeur de l’Odéon, Georges Lavaudant. Dans ce duo de maîtres, il y a le un “je ne sais quoi” français et une intime compréhension de la transposition très catholique du roman encore un peu picaresque de Goethe en drame de rédemption de Marguerite par le fervent Gounod (et ses librettistes Barbier et Carré). Alors que tout le personnel de l’opéra portait une Marguerite à la boutonnière pour la première du 1ier Février, l’Opera se concentre en effet plus sur le sauvetage de l’âme de la belle héroïne que sur la damnation du Docteur qui a pactisé avec le diable..

Alors que dès les premières notes, l’enchantement fonctionne et que le chœur rejoint bien vite l’orchestre dans la maîtrise du son, côté mise en scène, les choses se mettent plus progressivement en place.  Le plateau coulissant sur deux étages et tout en largeur choisi par Lavaudant sublime très lentement son aspect de docks pratiques dans un port européen pour se mettre au service de la rédemption de Marguerite. En effet, au début, l’on est un peu perdu des battements de rythmes et des jeux de mains démodés des chœurs. La cavatine excellente de John Osborn, très convaincant Faust, est déclamée dans un coin. Le veau d’or est littéralement constitué de Mephisto (la basse polonaise Adam Palka) entouré de deux poules qui semblent échappées du Crazy Horse et se tortillent. Et l’excellente Marguerite (la soprano Ruzan Mantashyan, de plus en plus envoûtante et charismatique à mesure que l’opéra progresse) crapahute en robe blanche trop courte et passe le troisième acte au lit.

Alors que l’émotion commence à peine avec l’air des bijoux et nous saisit avec le quatuor d’avant l’entracte, ce n’est que dans la deuxième partie que le génial travail sur la lumière et les rideaux tirés par les sbires de Mephisto donnent sa stature mystique à l’opéra. Les images que nous propose Lavaudant sont très catholiques, picturales et puissantes, parfaitement en phase avec l’ascension de la musique pour nous faire grimper vers des cimes sacrées.

Côté voix, la jeune équipe de soliste incarne parfaitement ce Faust flamboyant. Aux côté du trio principal, Jean-François Lapointe est remarquable en Valentin, Samantha Harley séduisante en Siebel et Marina Viotti aussi bonne comédienne que chanteuse dans Marthe.

On sort de l’opéra vraiment transportés, en se décidant que décidément on n’a pas assez vu et entendu ce grand opéra de Gounod. A réserver à Genève jusqu’au 18 février.

visuel : (c) Magali Dougados

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Yaël Hirsch
Co-responsable de la rédaction, Yaël est journaliste (carte de presse n° 116976), docteure en sciences-politiques, chargée de cours à Sciences-Po Paris dont elle est diplômée et titulaire d’un DEA en littérature comparée à la Sorbonne. Elle écrit dans toutes les rubriques, avec un fort accent sur les livres et les expositions. Contact : [email protected]

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